Antisémitisme: le modèle québécois encore derrière l’Ontario

376 / 672

Nombre d’actes antisémites commis au Québec / en Ontario en 2009.

Il n’y a rien à faire, le Québec est toujours à la traîne. Ce mercredi, comme chaque année, le B’nai Brith a rendu public son relevé des incidents antisémites commis au pays.  Les communautés juives étant les plus présentes au Québec et en Ontario, c’est là que le nombre d’intolérants est le plus grand. Un seul acte antisémite en est un de trop, mais ces chiffres sont intéressants en regard du procès permanent d’antisémitisme fait au Québec. On trouvait encore la semaine dernière cette perle, de Lorne Gunter, chroniqueur politique régulier du National Post.

Il y a toujours un important élément « pure laine » dans le mouvement souverainiste qui veut un Québec indépendant précisément pour y réduire l’influence des Juifs, des anglophones et des immigrants.

Je m’étais intéressé de près à ces questions, dans les années 1990, quand Mordecaï Richler décrivait le Québec dans les gazettes américaines comme une endroit tribal, obsédé, hautement anti-sémite mais avec de bons restaurants. J’avais noté le phénomène: en termes bruts, la vie est significativement plus dure pour la communauté juive en Ontario qu’au Québec. C’est injuste en soi, et injuste en mathématiques, puisque les Ontariens sont plus nombreux que nous.

Or, même ramené en proportion de la population, les Ontariens sont plus enclins aux gestes antisémites que les Québécois. En 2009, il faudrait qu’on ait recensé au Québec une trentaine d’actes de plus pour que l’intensité soit la même dans les deux provinces. Ou autrement calculé, les Ontariens auraient dû en commettre 50 de moins pour s’ajuster au niveau québécois.

Il y a donc un paradoxe, car historiquement les Québécois expriment aux sondeurs davantage d’opinions antisémites que ne le font les autres Canadiens. Le récent sondage de l’Association d’études canadiennes, déjà cité ici, donne cette ventilation des opinions très défavorables exprimées par les Ontariens et les Québécois envers des minorités.

Les Ontariens ont une opinion «très défavorable» :

5,5% des Amérindiens
5,2% des francophones
4,0% des immigrants
2,1 % des Juifs

Les francophones, eux, ont une opinion «très défavorable» :

6,5%  des Juifs
4,0% des Amérindiens
3,3% des immigrants
1,5% des Canadiens-anglais

Cette inversion est en soi intéressante. Les Canadiens-français sont les Juifs des Ontariens.

Plus intéressant encore: même si les Québécois avouent en bien plus grand nombre que les Ontariens une opinion défavorable des Juifs, ils sont moins enclins que les Ontariens à passer à l’acte antisémite.

Pour une fois, il faut féliciter les Québécois d’être des grands parleurs, mais des petits faiseurs… et espérer qu’ils ne soient ni l’un ni l’autre.

Note en petits caractères :

Les billets « Temps durs pour les détracteurs du modèle québécois » ne prétendent pas que tout est parfait au Québec, tant s’en faut. L’auteur a d’ailleurs proposé, dans ses ouvrages et sur ce blogue, des réformes nombreuses et importantes visant à surmonter plusieurs des importants défis auxquels le Québec est confronté. Cependant, la série permet de percer quelques trous dans le discours ambiant qui tend à noircir la situation globale du Québec qui, pourtant, affiche d’assez bons résultats comparativement aux autres sociétés semblables.