Souvenirs fantasmatiques

La vidéo était à la hauteur de notre colère. Une attachée politique forte en montage, Caroline Bouchard, l’avait préparée, à ma demande. J’étais soufflé par sa force de frappe. On y voyait Gabriel Nadeau-Dubois affirmer que les gens l’abordaient « tous les jours » pour lui dire : « On s’attend à ce que vous soyez au moins capables de discuter entre vous. » Discuter, voulait-il dire, d’un pacte électoral avec le Parti québécois, que je dirigeais (de 2016 à 2018). On y voyait aussi Manon Massé, sur une scène, avouer : « Les gens m’arrêtent dans la rue et me disent : “Manon, s’il vous plaît, alliez-vous !” » Puis apparaissaient Amir Khadir et Andrès Fonticella, tous deux extrêmement actifs pour convaincre leurs militants de « l’urgence d’agir », de faire front contre la droite. Amir avait dressé une liste de circonscriptions à se partager, sans toutefois nous l’avoir soumise. C’était trop tôt. On s’en parlerait après.

Le dégonflé et l’indispensable

René Lévesque nous regardait d’un air goguenard l’autre soir. Sa photo surdimensionnée est projetée sur le pavillon ovale de l’UQAM. Il semble se demander quel message les promeneurs tirent des panneaux informatifs qui se déploient devant lui pour résumer sa vie et son oeuvre.

La reproduction d’une rédaction qu’il avait produite à 13 ans, intitulée Pourquoi demeurer français ?, a retenu mon attention. En particulier cet extrait : « Nous sommes menacés, non de coup de foudre, mais de lente et sournoise pénétration. Devant ce péril nous n’avons d’autre défense que la lutte, et la lutte pour la vie. »

Chère Montréal

Je prends la plume aujourd’hui pour vous dire, chère métropole, combien je vous apprécie. J’entends et lis des choses désagréables à votre sujet. Certains affirment ne plus pouvoir supporter vos chantiers et vos nids-de-poule et déguerpissent à la campagne pour humer la bonne odeur du fumier. Bien amicalement : bon débarras ! À nous les joies de la ville.

Lucien Bouchard, l’anti-péquiste

En ce jour de janvier 1996, fraîchement couronné chef du Parti québécois, donc premier ministre, par des militants péquistes confiants qu’il les conduirait au pays, Lucien Bouchard tenait sa première réunion de caucus. Il avait mis son régulateur de charme à la position maximale. Évoquant les années où il avait eu sa carte de membre, il eut cet aveu : « Moi, je connais pas très bien le parti. Je donnais mon 3000 $ par année [le maximum permis à l’époque], ma femme donnait son 3000 $, mais on n’allait pas aux réunions et tout ça. » Assis au fond de la pièce, j’entendis un député dire à un autre : « Quand tu donnes 6000 $ par année, t’as le droit de pas venir aux réunions ! »