Jean Charest à l’épicentre du séisme

Un ancien ministre de la Justice vient d’impliquer directement le premier ministre sur deux plans: 1) réception de sommes irrégulières pour le financement électoral du PLQ; 2) trafic d’influence dans la nomination de trois juges.

Il ne s’agit pas d’un nouvel épisode dans le scandale de la corruption dans la construction. Il s’agit d’un nouveau séisme, sans précédent dans l’histoire moderne du Québec.

L’ex-ministre, Marc Bellemare, ne dit pas qu’il en a entendu parler ou qu’il connaît un témoin qui affirme que… Non. Le témoin, c’est lui. Il affirme avoir vu. Il affirme s’être plaint au premier ministre. Il affirme que le premier ministre a autorisé la réception des sommes irrégulières. Il affirme de plus que lui, ministre de la Justice, a participé au trafic d’influence en nommant les trois juges désignés par un entrepreneur en construction. Il est non seulement témoin et participant, mais coupable.

Nathalie Normandeau, que ce blogue a désigné Pompière de l’année 2009, a été envoyée au front pour nier en bloc la totalité des affirmations de son ex-collègue. Le gouvernement demandera à l’impétrant de se rétracter, sinon il le poursuivra pour calomnies. Une stratégie à la Mirador concoctée pour survivre aux premières heures du séisme, mais qui ne tiendra pas plus longtemps.

Une soif irrésistible de savoir

La première question posée est de savoir dans quel cadre l’ex-ministre Bellemare pourrait venir vider complètement son sac, puis comment le premier ministre pourra donner sa version des faits.

Question qui en entraîne une autre: maintenant que le premier ministre est accusé par son ancien ministre, comment peut-il être celui qui désigne, en toute impartialité, le juge ou les commissaires qui pourront faire la lumière sur cette affaire le concernant ?

Une question de crédibilité

Pour l’instant, nous n’avons que la parole du premier et les dénégations du second. La crédibilité des deux acteurs est au centre du jeu — on sait que celle de Marc Bellemare n’est pas la plus reluisante au Québec, mais un sondage Léger Marketing d’hier notait que l’opposition populaire au gouvernement Charest atteint des niveaux historiques. La crédibilité du premier ministre est donc extrêmement fragile.

La question est de savoir si, devant un juge ou des commissaires ou une commission parlementaire, l’ex-ministre pourra étoffer son témoignage avec des témoins supplémentaires, des notes prises au moment des faits, des conseillers auxquels il se serait ouvert de ces événements sur-le-champ.

Pour Jean Charest, la tâche sera plus difficile. Il devra faire la démonstration que ces événements n’ont pas eu lieu.