Mon premier discours de ministre

Version du 21 septembre 2012, 10h

PROJET D’ALLOCUTION

DU MINISTRE DES RELATIONS INTERNATIONALES,

DE LA FRANCOPHONIE ET DU COMMERCE EXTÉRIEUR,

M. JEAN-FRANÇOIS LISÉE

À L’OCCASION DE LA

JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA PAIX

 Hôtel de ville

Montréal, le 21 septembre 2012

 

Monsieur le maire de Montréal, Gérald Tremblay,

Monsieur Taminik  Rankin, Chef héréditaire Algonquin

M. Patrice Marier, représentant de Cercle de Paix

M. Richard Filion, directeur général du collège Dawson,

Distingués invités, Chers amis, amants de la paix

Une Journée internationale de la paix, donc.

N’est-ce pas là une occasion en or – une de plus – de se donner bonne conscience?

De rentrer ensuite chez soi le cœur léger, sans avoir changé les choses d’un iota, mais en se donnant rendez-vous pour l’an prochain.

De se dire qu’après tout, on fait ce qu’on peut. Et qu’à l’impossible nul n’est tenu.

Beaucoup d’entre nous, au fond d’eux-mêmes, n’ont-ils pas discrètement démissionné?

N’avons-nous pas intériorisé le fait que la guerre sera toujours parmi nous?

Beaucoup d’entre nous n’ont-ils pas été progressivement vaincus par un fatalisme qui ne dit pas son nom?

Par le sentiment que les guerres sont trop lointaines, trop complexes. Qu’elles échappent à notre pouvoir. Qu’elles font partie de notre être collectif, qui n’est pas joli.

N’est-ce pas être réaliste, n’est-ce pas faire preuve de maturité que de tenir pour acquis qu’elles seront toujours là?

D’« avoir raison avec Aron », qui disait que la guerre est de tous les temps historiques et de toutes les civilisations?

Et si…

Et si cette journée était l’occasion de prendre le contre-pied de cette terrible idée reçue de l’inéluctabilité des guerres.

D’imaginer qu’un autre monde est possible.

Encore faudrait-il avoir le courage de l’imaginer, justement, de le rêver, d’en parler.

Et pour cela nous disposons de moyens de communication que n’auraient pu imaginer les générations précédentes.

Il est possible, aujourd’hui, de se coaliser rapidement – voire instantanément – autour d’une cause. Il est possible d’exercer, collectivement, des pressions déterminantes.

Le citoyen, la société civile, les organisations non gouvernementales ont plus de moyens d’être acteurs, y compris sur des questions de relations internationales.

Mais même ces nouveaux outils ont leur part d’ombre.

La coordination sur Internet ou l’apparition d’armes légères et puissantes ont aussi introduit de nouveaux acteurs.

Des acteurs de la guerre, cette fois, qu’ils soient terroristes, criminels transnationaux.

Ou enfants.

Les enfants avaient rarement fait partie de l’histoire militaire. Sous certains cieux, ils sont désormais un actif abondant et bon marché, grâce auquel des gangs armés deviennent de véritables forces politiques.

Les orphelins du sida alimentent la guerre des enfants. Ce qui fait de la prévention des épidémies une question de sécurité militaire.

Il en va de même de la protection de l’environnement.

Les sécheresses induites par les changements climatiques seront source de transhumances forcées et de conflits autour de l’usage d’une eau devenue rare.

Et si les conflits sont source de pauvreté, la pauvreté est elle-même source de guerre.

Aussi, plus nous serons engagés dans le développement durable, plus nous serons solidaires contre la faim, l’ignorance, la pauvreté et la maladie, plus nous éliminerons le terreau qui alimente les conflits.

C’est pourquoi la « sécurité », concept global, se substitue à celui, plus limité, de « défense ».

Et, là-dessus, les Québécoises et les Québécois, très sensibles à ce qui se passe à l’extérieur de leurs frontières, ont le pouvoir d’intervenir.

J’en veux pour preuve le travail à l’étranger du Directeur général des élections.

J’en veux pour preuve l’engagement actif du Québec au sein de l’Organisation internationale de la Francophonie.

J’en veux pour preuve, la contribution de Québécois au sein des Casques bleus. Leur apport dans la tâche – concrète, complexe, parfois frustrante et toujours risquée – de séparer des combattants, d’assurer les transitions politiques, de créer les conditions concrètes de la paix..

J’en veux pour preuve la Déclaration de Saint-Boniface sur la prévention des conflits et la sécurité humaine, à la rédaction de laquelle le Québec, membre à part entière de l’Organisation internationale de la Francophonie, a été étroitement associé.

J’en veux pour preuve le foisonnement d’organismes de coopération québécois, engagés dans la solidarité internationale et l’aide humanitaire.

(Ici je sors du texte pour parler de Montréal et de Dawson)

J’en veux pour preuve, enfin, notre forte fibre environnementaliste.

Je suis fier de l’engagement des Québécois pour la paix.

Je suis fier de cet engagement qui, contrairement à ce qu’on laisse entendre dans certains cercles, va de pair avec une grande ouverture au monde.

Je suis fier, donc, tout en étant conscient qu’il reste beaucoup à faire.

En créant cette journée, l’Organisation des Nations Unies réaffirme son attachement à cette quête de paix d’humains épuisés et dégoûtés qui, après une première moitié de vingtième siècle désastreuse, l’a mise au monde.

Cette Journée internationale de la paix nous presse de dépasser nos divisions religieuses, ethniques ou culturelles.

Elle nous presse de prendre conscience de l’unicité de notre condition.

Elle nous exhorte à rejeter la peur de l’autre.

Cette idée d’une courte pause dans la folie qui embrase encore des coins du monde, cette journée où le monde donne à la guerre son congé, est de l’ordre du symbole.

Mais les symboles, on le sait, peuvent être source de grandes mobilisations, pour le meilleur comme pour le pire.

Aujourd’hui, c’est du meilleur qu’il s’agit.

Un symbole puissant, qui rassemble partout sur la planète, les femmes et les hommes de bonne volonté.

Pour que la guerre, un jour, rende enfin les armes.

Je vous remercie.

4 avis sur « Mon premier discours de ministre »

  1. bonjour,
    Encore une fois je suis épatée et vous remercie de nous communiquer ce récit de votre vie de député.Un peu de vertige avec çà?
    Je suis très fière de vous et de vous savoir si bien entouré. Bonne chance à tous.
    Anita Lavallée

  2. Intéressant de comprendre mieux votre travail et surtout, la qualité des gens qui vous entourent. Vous leur aviez dit que vous n’aimiez pas les guerre d’égo, que vous aimiez le professionalisme, ce discours à quelques heures de votre nomination vous à permis de représenter les québécois de façon professionelle et en le publiant, vous mettez votre rédacteur de discours sous les projecteurs, sans égard à votre égo, CQFD. Bravo.

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