Voir – Femmes d’action à l’écran : une déferlante

Ce n’est plus une tendance, c’est une déferlante. Les femmes d’action dominent désormais le genre. Dans l’attente de la sortie de Black Widow, avec Scarlett Johansson (deuxième film consacré à une héroïne de Marvel, après Captain Marvel –  1,1 milliard US au box office) et de la suite de Wonder Woman (820 millions US), sans parler de la version non-animée de Mulan de Disney, il faut constater que l’ère de la femme d’action s’impose à l’écran. C’est vrai pour les supers-héroïnes, vrai aussi pour les espionnes qui nous on offert, depuis deux ans, d’excellents films.

Coup sur coup, Charlize Theron dans Atomic Blonde et Jennifer Lawrence dans Red Sparrow renouvellent le genre et prennent le contrôle du narratif.

Les scénarios sont excellents, comme les interprétations. Une scène de bagarre dans un escalier dans Atomic Blonde est une pièce d’anthologie. Atomic présente son espionne au sommet de son art, alors que Red Sparrow suit la formation puis la progression de la sienne. Une suite à Atomic Blonde est en préparation. Lawrence, qui avait mis la table de la progression des femmes comme personnage principal d’action au cinéma avec sa série de quatre films Hunger Games, se dit partante pour reprendre son rôle de Red Sparrow.

L’évolution dans le temps des scénarios de Charlie’s Angels est aussi éclairante si on veut suivre la progression des femmes vers le pouvoir à l’écran La série télé de 1976-1981, avec Farraw Fawcett, avait  enchanté une génération d’auditrices en quête de femmes fortes (et d’auditeurs en quête de jolies femmes). Mais ces espionnes étaient au service de patrons. Même quand l’actrice/productrice Drew Barrymore a produit avec succès deux nouveaux films en 2000 et 2003, les patrons étaient toujours des hommes: Charlie, bien sûr, qu’on ne voit jamais, et son lieutenant Bailey.

Mais la nouvelle itération de 2019 produite par l’actrice/productrice Elisabeth Banks change la donne. Bailey est une femme (jouée par Banks) et Charlie…. je vous laisse deviner. C’est loin d’être un chef-d’oeuvre et le box office a été décevant. Il y a des trous dans le scénario, mais quelques scènes sont mémorables, comme la scène d’ouverture.

Je note de plus que le clip vidéo du film « Don’t call me angel » avec Ariane Grande, Miley Cyrus et Lana del Rey, présente des images de violence contre des hommes dont l’inverse ne serait pas acceptable.

Le cas de Luc Besson est aussi intéressant. En 1990 il avait lancé Nikita, film sur une toxicomane devenue tueur d’élite. Cela avait fait époque. En 2019 son film Anna fut mal reçu par la critique qui y a vu une simple reprise de Nikita. Mais contrairement au cas de Nikita, le patron d’Anna est une patronne (Helen Mirren, excellente) et elle réussit à prendre le contrôle de son destin. Moi, j’ai passé un bon moment m’a plu.

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Intéressant de noter que Besson a réalisé Anna pour se refaire de la très décevante réception de son adaptation des aventures de Valérian et Laureline (Valérian et l’empire des 1000 planètes). Visuellement époustouflant, le film rate totalement le casting et l’interaction entre les deux personnages de bédé qui avait bercé nos adolescences. Alors que la série de bd montre deux jeunes adultes, avec une Laureline de plus en plus affirmée dans le couple, Breton a choisi pour son film deux grands ados avec un Valérian obnubilé par Laureline. La relation, visant, peut-on penser, à donner le beau rôle au personnage féminin, est en fait simpliste, sans grand intérêt et les dialogues sont insipides. Dommage, compte tenu de la qualité de l’oeuvre d’origine et des mondes visuels créés par Besson. Il est intéressant de noter qu’après cet échec, Besson s’est tourné vers un autre personnage féminin pour remplir ses coffres.

À la télé, Carrie Mathison de Homeland remplace Jack Baer de 24

Le genre espion/action fut dominé pendant les années 2000 par le super-espion anti-terroriste Jack Bauer, de la série 24 (204 épisodes entre 2001 et 2010).

Mais de 2011 à 2020, c’est la super-espionne Carie Mathison qui prend la place. Bien qu’elle soit le personnage principal dès la première saison, notez comment les affiches la présente, à la saison un, derrière le personnage masculin, puis devant à la saison 2, au centre dans la saison 3, puis seule pour les autres saisons. Un beau cas de prise d’espace féminin (woman-spreading ?). La série présente également la montée d’une femme présidente (24 avait introduit l’idée d’un président noir et plusieurs croient que cela a normalisé le concept à temps pour l’élection d’Obama en 2008).

La série se termine cette année avec une dernière saison d’assez bonne tenue (sur Showtime). Il faut souligner à grand trait que la première saison, adaptée d’une série israélienne, présente un arc dramatique proprement shakespearien. À voir absolument. (Disponible sur Netflix.)

L’autre série télé à la mode présente deux espionnes opposées, russe et britannique, dans Killing Eve, excellent. Voyez la progression. Dans 24 le personnage masculin domine. Dans Homeland le personnage féminin domine. Dans Killing Eve, les personnages masculins ne sont pas seulement secondaires, ils sont tertiaires.

Cette prise de place des femmes dans les films d’action est également perceptible dans des séries établies. La franchise Mission Impossible, reprise par Tom Cruise, présentait dans un premier temps des personnages féminins mineurs. Mais les deux derniers épisodes ont introduit une espionne (admirablement jouée par Rebecca Ferguson) qui est d’égale force avec le personnage principal. On annonce qu’elle sera aussi présente dans les deux prochains épisodes.

Reste James Bond. Daniel Graig va l’incarner encore pour un épisode et il fut question un temps de faire en sorte que le prochain Bond soit une femme. Cela fut écarté par la productrice Barbara Broccoli en janvier dernier. Mais la bande annonce du prochain Bond introduit une nouvelle espionne 00 qui semble donner du fil à retordre au stéréotype masculin incarné historiquement par Bond à l’écran.

On ne peut passer sous silence le changement de paradigme opéré dans la dernière trilogie de Star Wars. Bien sûr chacun a noté que le héros est une héroïne: Rey. Mais le changement est plus profond. Dans les trilogies précédents, les héros masculins, dirigés par des hommes, affrontaient des vilains masculins, dirigés par des hommes.

Dans la nouvelle trilogie, l’héroïne est dirigée par une femme (la princesse Léia devenue général), mais les vilains sont toujours des hommes dirigés par des hommes. Le second volet, Le dernier Jedi, est d’ailleurs en partie le récit de la sagesse des commandantes femmes face à l’indiscipline d’un personnage masculin.

La revanche ultime: Harley Quinn

Cette progression du pouvoir féminin au grand écran semble trouver une sorte d’aboutissement (pour l’instant) avec le récent Birds of Prey. On est dans l’univers DC Comics à Gotham city. Harley Quinn est la copine du Joker (invisible dans le film), mais se fait rejeter par son homme.

Le film est l’histoire de sa « formidable libération ». Survolté, ironique, très violent, le film multiplie les personnages féminins imparfaites mais admirables et les personnages masculins, parfaitement détestables (tous, sans exception).

Divulgâcheur: à force de coups de poings, de coups de pieds et de battes de baseball, notamment dans l’entrejambe masculin, les femmes triomphent. Ce n’est pas excellent. C’est cartoonesque et on rit assez souvent. C’est surtout un marqueur culturel dans la déferlante de la « formidable libération » des femmes d’action.

Disponible en cinéma télé à la carte


La bande annonce de ma dernière balado:

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1 avis sur « Voir – Femmes d’action à l’écran : une déferlante »

  1. Je ne suis pas génial en science fiction. Place à un meilleur, au présent.

    -Ça se pose parfois comme événement, la folie est proche du génie. Je corrige, je dirais plutôt, je dirais même comme les Dupond.t, le génie est proche de la folie. À chacun sa chance, inégale pour tout le monde. Je tiens le renseignement de plusieur.es dont Robert Dutil, La Juste Inégalité : Essai sur la liberté, l’égalité et la démocratie. Quelle idée de publier ce livre en 1995 ? Bon.

    Je dirais qu’avec le temps, le divertissement est devenu plus important que la suite à Sapiens. Yuval Noah Harari en hébreux en 2015, en anglais en 2016 et en français en 2017, propose en deuxième livre Homo deus : Une brève histoire du futur. Quelle histoire !

    Côté Sol Zanetti, Marianne est enceinte; pas en plein.e Victoriavirus mais en début de Coronavirus. Ça me réjouis, ça m’intéresse, mais ça m’inquiète. Il s’en est exposé sur sa Facebook. J’en observe, note et expose les j’aime et les suivre. J’en blogue : RJJYL.

    Tout ne se planifie pas, tout se joue. Les communistes l’on apprit à l’exercice et il faut s’enrichir de leur expérience, si je peux suggérer ici.

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