1) Je démissionne 2) Récompensez-moi!

teddysJ’adore ces vieilles expressions:  « Il est parti sans demander son reste, »  par exemple. Vous savez que cela signifie que la personne a quitté son travail sans demander qu’on lui verse la portion de salaire qu’on lui devait pour les jours écoulés depuis sa dernière paye.

Malheureusement, aujourd’hui, cette pratique est en voie de disparition. Au contraire, il arrive que les démissionnaires réclament un dédommagement pour leur décision de partir. On l’a vu notamment dans le cas d’Henri-Paul Rousseau et de barons d’industrie. C’est prévu  dans leur contrat d’embauche. C’est la clause où l’employeur averti a indiqué : By the way, si tu es tanné ou tu as une meilleure offre ailleurs, on te récompensera quand tu nous lâcheras ! (Bon, ce ne sont pas les termes légaux exacts, mais le sens y est.)

Depuis quelque temps, la Ligue des contribuables du Québec, un groupe auto-proclamé qui compte environ 500 personnes sur sa liste d’envoi, mais qui a droit à son opinion, soulève une question connexe. Les députés qui quittent leur charge en cours de mandat ne sont certes pas récompensés pour le faire. Mais devraient-ils être pénalisés (comme les chômeurs volontaires qui ont moins de droit que les autres) ?

Dans le choix de ses Gloutons d’or 2009, remis le 31 janvier, la Ligue désigne la Caisse de dépôt pour les pertes et les primes de départ, puis la ville de Montréal pour la gabegie des contrats (Glouton d’argent), puis finalement les députés démissionnaires des années 2008 et 2009 :

Le Glouton de bronze est remis aux onze députés qui ont démissionné quelques mois seulement après l’une ou l’autre des élections générales qui ont eu lieu au Québec depuis deux ans. Ils ont eu droit à des allocations de transition variant entre 98 000 $ et 146 000 $, en plus de forcer la tenue de neuf élections partielles. La facture globale pour les contribuables s’élève à 6,5 millions de dollars.

« Ce genre de prime encourage en quelque sorte nos politiciens à démissionner avant la fin de leur mandat, fait remarquer Mme Claire Joly (Directrice générale de la Ligue). Il s’agit d’une pratique de rémunération absurde qui n’existe pas dans le secteur privé. Par contre, de telles allocations semblent assez répandues dans le secteur public. Elles devraient être abolies ».

Cela tombe bien, l’Assemblée nationale est saisie d’un projet de loi de réforme électorale. Le moment serait bien choisi d’introduire une disposition réfléchie. Mon hypothèse de départ: cela peut varier, mais établissons qu’un mandat normal est de quatre ans, donc de 48 mois. C’est le temps pour lequel le député a été élu. S’il quitte ses fonctions après, disons, huit mois, faisons en sorte qu’il n’ait droit qu’à une fraction — 8/48 — de la prime de transition qu’il aurait obtenue s’il avait terminé son mandat. Cela pénaliserait cependant davantage les députés qui ont siégé plus longtemps, car leur prime est plus élevée. Il faudrait donc que cette soustraction s’applique à la portion de la prime accumulée au cours du mandat précédent du député.

Mais alors, que faire du député qui vient d’être élu pour une première fois, et qui quitte après quelques mois ? Le cas est rarissime. On pourrait alors prévoir une amende.

Je connais bien deux démissionnaires péquistes récents: François Legault et Camil Bouchard. Je ne leur en ai pas parlé, mais j’ai la conviction qu’ils n’auraient eu aucune objection à se conformer à cette règle.

On pourrait pousser plus loin et interdire les partielles en faisant désigner,  au moment de l’élection, un suppléant qui remplacerait le député en cas de décès ou de démission. Ou alors utiliser un processus de désignation d’un remplaçant, du même parti, pour terminer le mandat. Cela existe ici et là dans d’autres démocraties.

Je suis contre, car les partielles sont utiles. Elles permettent de vérifier la popularité du gouvernement et des oppositions, entre les élections. Elles donnent souvent un signal avant-coureur de l’évolution de l’électorat — comme lors de la montée de l’ADQ.

Mais ce serait à mon avis un cas où les députés feraient preuve d’un sens éthique — une valeur très recherchée ces temps-ci. Ah, un dernier point, ma réforme s’appliquerait évidemment aussi dans le cas de députés qui démissionnent à la suite de scandales… éthiques. Et toc !

Merci à l’alertinternaute François 1 pour ce signalement.