Ah qu’elle est riche, la sauce terre-neuvienne !

Oil-Drum-Stuffed-With-Money-150x150 Ce qui est bon pour l’oie est bon pour le jars » selon l’adage anglophone repris cette semaine par notre voisin et ami le premier ministre ontarien Dalton McGuinty. (En fait, l’expression d’origine dit que la même sauce doit être appliquée sur les deux volatiles, qu’on suppose, en l’espèce, déjà cuits. Mais je m’égare.)

Ces temps-ci, au Canada, l’oie est Terre-Neuve et les jars (le mâle de l’oie) sont les provinces dont les initiales ne sont pas T-N.

Nous avons vu hier comment pourrait s’appliquer à l’avantage du Québec la garantie de prêt sortie de la boîte à surprise fédérale pour le projet hydro-électrique terre-neuvien. Appliqué à la dette de notre jars Hydro-Québec, cela nous économiserait 9 milliards de beaux dollars.

La sauce au pétrole

Mais il y a une autre sauce dont l’oie terre-neuvienne a profité à plein ces dernières années: la sauce, très riche, de l’aide au pétrole.

D’abord il faut dire qu’à la loto-énergie, si le Québec a hérité d’un potentiel d’énergie propre, il a totalement manqué le train de la distribution de sauce fédérale.

En 2007, le groupe de recherche Energy Probe a calculé que l’investissement fédéral dans le nucléaire s’élevait à 20 milliards $, ce qui a généré pour 75 milliards$ de la dette fédérale actuelle… sans que le Québec ne profite d’une part significative de ce magot.

Mieux encore, le service de recherche de la Bibliothèque du Parlement fédéral, à partir des rapports du commissaire à l’environnement, a calculé qu’Ottawa avait versé seulement entre 1970 et 1999, 40 milliards en subventions et crédits d’impôts divers à l’industrie pétrolière, gazière et du charbon, des industries jusqu’ici inexistantes au Québec. En dollars de 2007, cela fait 79 milliards.

Notons que dans les deux cas, les contribuables québécois ont contribué pour plus de 20% à ces subventions fédérales à nos amis et voisins des autres provinces.

Or voilà que nous avons trouvé du pétrole, à Old Harry, au large des Iles-de-la-Madeleine.

Une question nous saute au visage: ce qui fut bon pour l’oie terre-neuvienne dans le cas du développement de ses gisements d’Hibernia sera-t-il bon pour les jars que nous sommes ?

Voyons ce que ça donnerait.

Une averse, non. Une forte pluie, non. Un déluge d’aide fédérale.

Voici comment un site fédéral résume les choses, pour le développement d’Hibernia:

83139_HiberniaAdventures-150x150Le 18 juillet 1988, le gouvernement fédéral a révélé les détails d’un accord conclu avec un consortium de quatre sociétés au sujet de l’exploitation du gisement Hibernia.  L’accord prévoyait une subvention fédérale d’immobilisations de 1,04 milliard de dollars, une garantie fédérale d’emprunt de 1,66 milliard de dollars, une participation fédérale de 300 millions de dollars aux intérêts, un financement temporaire de 175 millions de dollars […]. En 1993, le gouvernement a offert aux trois partenaires [trois compagnies pétrolières engagées dans Hibernia] des prêts sans intérêt pouvant atteindre 132 millions de dollars.

On a donc très hâte de voir si les goussets fédéraux seront également présents pour les entreprises (qu’on espère au moins partiellement québécoises) qui feront les travaux à Old Harry.

Mais ce n’est pas tout. Il y a beaucoup de sauce, de toute nature, sur l’oie terre-neuvienne.

Quand les Terre-Neuviens ont signé avec Ottawa, en 1985, une entente semblable à celle que Québec vient de signer avec Ottawa pour Old Harry, nos voisins et amis ont obtenu que la richesse créée par Hibernia ne soit pas prise en compte dans le calcul de la péréquation. Bref, même si Terre-Neuve s’enrichissait, il fallait faire comme si elle ne s’enrichissait pas, et continue à recevoir de la péréquation — payée, il faut le rappeler, pour 20% par les contribuables québécois.  Depuis, Terre-Neuve a reçu 4,6 milliards « comme si » elle n’avait pas de pétrole — dont  1,15 du Québec.

Il ne serait évidemment que justice que l’entente Ottawa-Québec inclue cette clause.

Oups ! Bizarre. J’ai beau lire et relire, je ne la trouve pas.

Gilles, Pauline, Jean, Nathalie: au travail !

Il reste 27 jours avant l’élection.

Ce contenu a été publié dans Canada, Sables mouvants par Jean-François Lisée. Mettez-le en favori avec son permalien.

À propos de Jean-François Lisée

Il avait 14 ans, dans sa ville natale de Thetford Mines, quand Jean-François Lisée est devenu membre du Parti québécois, puis qu’il est devenu – écoutez-bien – adjoint à l’attaché de presse de l’exécutif du PQ du comté de Frontenac ! Son père était entrepreneur et il possédait une voiture Buick. Le détail est important car cela lui a valu de conduire les conférenciers fédéralistes à Thetford et dans la région lors du référendum de 1980. S’il mettait la radio locale dans la voiture, ses passagers pouvaient entendre la mère de Jean-François faire des publicités pour « les femmes de Thetford Mines pour le Oui » ! Il y avait une bonne ambiance dans la famille. Thetford mines est aussi un haut lieu du syndicalisme et, à cause de l’amiante, des luttes pour la santé des travailleurs. Ce que Jean-François a pu constater lorsque, un été, sa tâche était de balayer de la poussière d’amiante dans l’usine. La passion de Jean-François pour l’indépendance du Québec et pour la justice sociale ont pris racine là, dans son adolescence thetfordoise. Elle s’est déployée ensuite dans son travail de journalisme, puis de conseiller de Jacques Parizeau et de Lucien Bouchard, de ministre de la métropole et dans ses écrits pour une gauche efficace et contre une droite qu’il veut mettre KO. Élu député de Rosemont en 2012, il s'est battu pour les dossiers de l’Est de Montréal en transport, en santé, en habitation. Dans son rôle de critique de l’opposition, il a donné une voix aux Québécois les plus vulnérables, aux handicapés, aux itinérants, il a défendu les fugueuses, les familles d’accueil, tout le réseau communautaire. Il fut chef du Parti Québécois de l'automne 2016 à l'automne 2018. Il est à nouveau citoyen engagé, favorable à l'indépendance, à l'écologie, au français, à l'égalité des chances et à la bonne humeur !