Avatar: Une fiction qui dérange

avatar1Il ne faut pas que Richard Desjardins voie Avatar, le film de science fiction de James Cameron.

Aux deux-tiers du film de 162 minutes, un gigantesque arbre est détruit. Desjardins n’y survivrait pas. En fait, même Jacques Brassard serait triste.

Car le message central d’Avatar, que j’ai vu ce week-end (oui, je sais, je suis tardif, mais il y a un bébé à la maison), est écologiste. Il s’agit d’une fable sur la destruction de l’environnement et sa défense. Cameron est transparent: les Américains qui veulent ravager une forêt extraterrestre pour y creuser une mine représentent notre ‘côté obscur ». La tribu des Na’vi, sychrones avec la nature, représentent « ce que nous souhaiterions être ». Le passage de certains Américains dans la peau des Na’vis représente notre capacité de nous transformer.

Tout ce que vous avez entendu est vrai:

1) Le scénario d’Avatar est complètement prévisible, dès les premières minutes. C’est Pocahontas rencontre Danse avec les loups, dans l’espace.  (Dans la version anglaise, je suis presque certain d’avoir entendu le personnage principal mal prononcer le nom d’un des Na’vi pour que ça sonne comme Pocahontas).

Ainsi, côté profondeur et inventivité du scénario, Avatar ne va pas à la cheville de la trilogie Matrix des frères Wachowski, que j’ai revue récemment et qui n’a pas pris une ride et qui, d’après moi, est pour l’instant au sommet de ma liste de la meilleure science-fiction filmée.

2) Les effets spéciaux sont extra-ordinaires. La capacité qu’a eu Cameron d’inventer un univers et de le rendre complètement crédible est un tour de force. La version 3-D enrichit l’expérience virtuelle, mais à aucun moment Cameron ne joue avec les gadgets 3-D, en essayant de projeter un monstre ou un objet vers le spectateur. La technique est au service du récit.

3) Même si on connaît la fin dès le début, le rythme est bon, les dialogues bien ciselés, les performances crédibles, les rebondissements, nombreux — et notre intérêt est soutenu par l’émerveillement constamment renouvelé par la jungle magique créée sous nos yeux. Nous sommes pris en main par un cinéaste de talent.

Le critique américain Roger Ebert a déclaré que voir Avatar était comme d’assister au premier Star Wars. C’est vrai pour la prouesse technologique et la création d’un univers.

Je dirais cependant que voir Avatar est comme assister à une version sur stéroïdes de Une vérité qui dérange, d’Al Gore. Le documentaire, qui a valu à l’ex vice-président américain le prix Nobel, a rapporté 50 millions de dollars au box office en quatre ans. (Note du blogueur: il est scandaleux qu’on ne puisse comparer le succès des films qu’avec les ventes de billet, plutôt qu’avec le nombre d’acheteurs de billets. Mais, bon.)

Avatar a récolté, en six semaines, 32 fois plus. Et ce n’est qu’un début. Le message écolo/anti-colonial/anti-militaire/anti-raciste/anti-capitaliste d’Avatar est donc autrement plus puissant, a une capacité de pénétration des conscience autrement plus efficace, que le powerpoint filmé d’Al. (Sans compter que Cameron nous promet deux suites.)

Voilà pourquoi, plus que toute autre chose, Avatar est une fiction qui dérange, au premier chef la droite américaine. (Voir entre autres ici.) Avatar n’est pas le meilleur film de science-fiction jamais produit. Mais c’est le meilleur film de l’ère post-Copenhague qu’on aurait jamais pu imaginer.

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À propos de Jean-François Lisée

Il avait 14 ans, dans sa ville natale de Thetford Mines, quand Jean-François Lisée est devenu membre du Parti québécois, puis qu’il est devenu – écoutez-bien – adjoint à l’attaché de presse de l’exécutif du PQ du comté de Frontenac ! Son père était entrepreneur et il possédait une voiture Buick. Le détail est important car cela lui a valu de conduire les conférenciers fédéralistes à Thetford et dans la région lors du référendum de 1980. S’il mettait la radio locale dans la voiture, ses passagers pouvaient entendre la mère de Jean-François faire des publicités pour « les femmes de Thetford Mines pour le Oui » ! Il y avait une bonne ambiance dans la famille. Thetford mines est aussi un haut lieu du syndicalisme et, à cause de l’amiante, des luttes pour la santé des travailleurs. Ce que Jean-François a pu constater lorsque, un été, sa tâche était de balayer de la poussière d’amiante dans l’usine. La passion de Jean-François pour l’indépendance du Québec et pour la justice sociale ont pris racine là, dans son adolescence thetfordoise. Elle s’est déployée ensuite dans son travail de journalisme, puis de conseiller de Jacques Parizeau et de Lucien Bouchard, de ministre de la métropole et dans ses écrits pour une gauche efficace et contre une droite qu’il veut mettre KO. Élu député de Rosemont en 2012, il s'est battu pour les dossiers de l’Est de Montréal en transport, en santé, en habitation. Dans son rôle de critique de l’opposition, il a donné une voix aux Québécois les plus vulnérables, aux handicapés, aux itinérants, il a défendu les fugueuses, les familles d’accueil, tout le réseau communautaire. Il fut chef du Parti Québécois de l'automne 2016 à l'automne 2018. Il est à nouveau citoyen engagé, favorable à l'indépendance, à l'écologie, au français, à l'égalité des chances et à la bonne humeur !