Comment battre Harper en 2015!

Étant toujours prêt à rendre service, j’aurais un conseil à donner aux Libéraux fédéraux et aux Néo-démocrates qui s’interrogent sur leur avenir.

Mais d’abord, faisons un peu de politique fiction. Un internaute, Vid, a recalculé l’élection du 2 mai en posant l’hypothèse que le NPD et le PLC n’aient formé qu’un seul et même parti et aient  — ce qui est hautement improbable — conservé la totalité des votes libéraux et néo-démocrates.

Voici ce que ça donne:

libdem

 

 

 

 

 

Étonnant, non ? (cliquez pour agrandir)

On peut voir d’autres détails et ses représentations du vote réel ici.

Bref: 187 sièges aux Lib-dems, 120 aux Conservateurs, un au Parti vert, aucun au Bloc. La marge de victoire des lib-dems est assez grande pour croire qu’une déperdition importante des votes au moment de la fusion (les libéraux de centre allant aux conservateurs) aurait quand même assuré la victoire.

La malédiction de la division

Jean Chrétien connaît bien la chanson. Il fut réélu et réélu avec des majorités grâce à la division de ses adversaires qui, pourtant, cumulativement, avaient davantage de votes que lui. Cependant il avait des adversaires à droite — le Reform et le vieux Parti conservateur — et des adversaires à gauche — le NPD et les Verts naissants — et des adversaires dans le dos — le Bloc au Québec.

Cette fois-ci, Stephen Harper a beaucoup d’adversaires au centre et à sa gauche. Il demande sans doute chaque soir à ses députés évangélistes de prier Dieu pour que jamais le NPD et le PLC (et les Verts) ne forment de coalition électorale.

Dieu semble avec lui. Les premiers échos qui nous parviennent du NPD et des Libéraux pointent vers un maintien de leurs indépendances respectives. Ce qui est parfaitement normal à ces stades préliminaires d’une joute qui durera, on le sait, plus de quatre ans.

Cependant il y a peut-être une voie qui permettrait de maintenir ces indépendances tout en renversant, le 19 octobre 2015, date de l’élection, le gouvernement Harper.

Assumer la coalition

Un des legs les plus importants de l’élection du 2 mai est la légitimation, par le discours de Harper et dans une large fraction de l’électorat canadien, de l’idée d’une coalition.

Le PLC, le NPD et le Parti vert devraient donc dans, disons, deux ans, affirmer officiellement qu’ils envisagent, si aucun d’entre eux n’est majoritaire à l’élection de 2015, de former une réelle coalition, dirigée par le parti qui a le plus de sièges, et intégrant des ministres des deux autres partis en proportion des sièges et/ou du vote populaire exprimé

L’idée doit faire son chemin dans les esprits pour annoncer l’affrontement Harper/coalition qui aura lieu à l’élection de 2015.

Promouvoir la proportionnelle

Une majorité de Canadiens savent désormais que le système électoral canadien ne permet pas une réelle représentation démocratique. 60% des Canadiens (83% des Québécois) ont voté contre les Conservateurs, qui détiennent pourtant le pouvoir absolu.

Les partis de la future coalition devraient donc s’entendre, à l’avance, sur le principe d’une réforme du système électoral comme priorité de leur futur gouvernement. Il n’ont pas besoin de choisir précisément la formule et de se diviser sur les détails. Il faut avancer le principe.

Obtenir une majorité de sièges

Évidemment, cela ne suffira pas à renverser Harper. Si chaque candidat conservateur se présente dans chaque circonscription contre trois candidats de la coalition — PLC, NPD et Vert — la reconduction d’une majorité conservatrice restera relativement aisée. (Mais pas certaine.)

C’est pourquoi je soumets respectueusement à mes encore concitoyens canadiens non-conservateurs d’innover. Et de procéder par étapes.

1. Après le budget de février/mars 2013, constituez un comité de sages représentant chacun des trois partis pour envisager des voies communes d’action;

2. A l’automne 2013, le comité fait son rapport et converge sur deux points essentiels: si aucun des trois partis n’obtient de majorité le 19 octobre 2015, le parti en avance dirigera une coalition intégrant des ministres des deux autres partis, en proportion de leurs votes et de leur siège, dans une formule à trouver mais prévisible;

3. Début 2014, les trois partis ayant approuvé ces principes, renvoient les sages discuter des modalités de, cette fois, un accord électoral;

4. Automne 2014, les sages déposent leur rapport qui stipule ce qui suit:

– Au printemps 2015, dans chaque circonscription, auront lieu des primaires pour déterminer lequel des candidats de trois partis reçoit le plus grand appui des militants;

– Pour ce faire, chaque parti devra désigner son candidat potentiel et vendre des cartes de son parti dans la circonscription. Un scrutin sera organisé et les membres des trois partis choisiront le candidat;

– Le candidat emportant le plus de votes gardera son identification et son appartenance à son parti d’origine mais les deux autres partis appelleront à voter pour ce candidat à l’élection de l’automne et ne présenteront pas leurs propres candidats;

– Les chefs des trois partis seront exemptés, bien sûr, de cette procédure, ainsi que les députés de chaque parti qui détiennent leurs sièges depuis l’élection de 2008, donc qui ont remporté deux fois leurs circonscriptions et qui se représentent;

– Tous les candidats ainsi désignés s’engagent à voter une réforme du système électoral qui permettra, ensuite, à chacun des partis de maintenir son indépendance lors des élections suivantes, ce processus de 2015 ayant été exceptionnel pour assurer la chute des Conservateurs et la transformation du système démocratique.

5. Fin 2015, les trois partis acceptent la recommandation des sages;

6. De janvier à fin mai 2015, forte organisation des trois partis dans les circonscriptions, désignation de leurs candidats;

7. Début juin 2015, vote dans les circonscription et désignation des candidats de la coalition;

8. 19 octobre 2015, élection d’une majorité de candidats des trois partis, formation d’un gouvernement de coalition, adoption, en 2016-2017, d’une réforme électorale;

9. 19 octobre 2020, première élection canadienne avec le nouveau système électoral.

Le problème du Québec

Vous avez bien vu que le Bloc québécois, qui a pourtant remporté 23% du vote au Québec le 2 mai, davantage que les Libéraux ou les Conservateurs, n’est pas mentionné dans cette proposition.

Cette éventualité n’est simplement pas envisageable. Jamais un parti fédéraliste n’accepterait que dans une circonscription québécoise un candidat bloquiste soit choisi et qu’ainsi, des partis fédéralistes appellent à voter pour lui.

Mais faites comme d’habitude et ne vous préoccupez pas trop du Québec. Qui sait, en octobre 2015, peut-être ne fera-t-il même plus partie du Canada, ce qui vous facilitera la tâche.

Ah, oui, je sais. Il est presque aussi ridicule de dire, aujourd’hui, que le Québec sera souverain en 2015 que d’avoir affirmé, le premier mai dernier, que le NPD aurait 58 députés au Québec…