Étudiants : s’autoriser à appeler au calme

1872abec42de3e27c2bf31356a13a1a2-150x150Ainsi, Gabriel Nadeau-Dubois, co-porte-parole de la CLASSE, affirme qu’il « n’a pas le pouvoir d’en appeler au calme ».

Pour avoir été, dans ma jeunesse, très impliqué dans des mouvements étudiants et dans des groupuscules peu enclins au compromis avec l’État bourgeois, je comprends fort bien la pression qui s’exerce sur la nouvelle vedette de la jeunesse rebelle.

Cependant vient un moment où on ne peut plus se cacher derrière son titre de « co-porte-parole » et où il faut plutôt assumer l’ascendant et la crédibilité que sa position génère, chez les militants comme dans le public.

Nadeau-Dubois ne semble pas être un dernier de CLASSE. Il comprend fort bien que la violence associée aux manifestations dessert la cause étudiante dans l’opinion publique, fait le lit d’une répression plus grande encore et permet au gouvernement Charest de provoquer dans l’opinion conservatrice un ressac qui lui ouvre le chemin de la réélection… donc de l’imposition de la hausse.

Je suppose que M. Nadeau-Dubois n’a pas réussi à faire triompher cette analyse au sein de son dernier congrès hebdomadaire. Il pourra réessayer en fin de semaine prochaine. Cependant, comme le font parfois d’autres co-porte-paroles d’une organisation hyperdémocratique, Amir Khadir et Françoise David, il y a des moments où il faut se poser en leader, s’étendre le cou, et dire ce qui doit être dit pour le bien de sa propre cause et pour le bien commun.

La crédibilité s’accumule. Parfois, il faut la dépenser. Le moment était venu de le faire mercredi de cette semaine. Il l’est encore aujourd’hui.

Qui est l’adulte dans la pièce ?

Il y en a un, cependant, qui n’a pas d’excuse. Un qui a une très grande marge de manœuvre dans ses actions et ses paroles et qui en use généralement d’abondance : le premier ministre du Québec.

Qu’il dénonce la violence, cela va de soi. Mais on aimerait aussi l’entendre appeler au calme. Calme des étudiants — même s’ils ne l’écoutent pas. Calme des administrations scolaires dans l’application des injonctions, qui sont, dans la plupart des cas, inapplicables et génératrices de violence.

Qu’il appelle aussi au calme des forces policières. Nous avons maintenant trop de cas et de témoignages d’usage excessif de la force policière pour qu’un chef de gouvernement reste coi. Qu’il loue le travail des policiers, qui sont, en ce moment, surchargés, bien sûr. Mais qu’il use de son autorité pour appeler à la plus grande retenue possible dans ces circonstances difficiles.

On peut être à 75 % insatisfaits du premier ministre. Mais, pour l’instant, c’est le seul disponible.

Si Jean Charest avait l’air un peu triste que de simples citoyens soient blessés lors de manifestations qu’ils souhaitaient pacifiques, ce serait déjà ça de pris.

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À propos de Jean-François Lisée

Il avait 14 ans, dans sa ville natale de Thetford Mines, quand Jean-François Lisée est devenu membre du Parti québécois, puis qu’il est devenu – écoutez-bien – adjoint à l’attaché de presse de l’exécutif du PQ du comté de Frontenac ! Son père était entrepreneur et il possédait une voiture Buick. Le détail est important car cela lui a valu de conduire les conférenciers fédéralistes à Thetford et dans la région lors du référendum de 1980. S’il mettait la radio locale dans la voiture, ses passagers pouvaient entendre la mère de Jean-François faire des publicités pour « les femmes de Thetford Mines pour le Oui » ! Il y avait une bonne ambiance dans la famille. Thetford mines est aussi un haut lieu du syndicalisme et, à cause de l’amiante, des luttes pour la santé des travailleurs. Ce que Jean-François a pu constater lorsque, un été, sa tâche était de balayer de la poussière d’amiante dans l’usine. La passion de Jean-François pour l’indépendance du Québec et pour la justice sociale ont pris racine là, dans son adolescence thetfordoise. Elle s’est déployée ensuite dans son travail de journalisme, puis de conseiller de Jacques Parizeau et de Lucien Bouchard, de ministre de la métropole et dans ses écrits pour une gauche efficace et contre une droite qu’il veut mettre KO. Élu député de Rosemont en 2012, il s'est battu pour les dossiers de l’Est de Montréal en transport, en santé, en habitation. Dans son rôle de critique de l’opposition, il a donné une voix aux Québécois les plus vulnérables, aux handicapés, aux itinérants, il a défendu les fugueuses, les familles d’accueil, tout le réseau communautaire. Il fut chef du Parti Québécois de l'automne 2016 à l'automne 2018. Il est à nouveau citoyen engagé, favorable à l'indépendance, à l'écologie, au français, à l'égalité des chances et à la bonne humeur !