Faut-il crucifier W ? Oui et non

A mon avis, ce qui fait tomber W dans le camp des maudits est son appui au moins tacite à la torture. Il n’en a pas, comme Dick Cheney, vanté ouvertement les mérites, mais il l’a voulue et l’a couverte. Il devrait, pour cela, répondre de ses actes, y compris devant les tribunaux et jusqu’en geôle.

Pour le reste, s’il fut certes incompétent, il pourra plaider sur trois points des circonstances atténuantes: les raisons de l’invasion en Irak, son rôle dans la sortie du bourbier, son rôle dans la crise financière. Je les prends un par un:

* Entrer en Irak.  La possession, par Saddam, d’armes de destructions massives n’était peut-être pas la vraie raison de l’invasion, mais nous avons des raisons de croire que W y croyait vraiment. Aveuglement volontaire ? En tout cas les témoignages recueillis par Bob Woodward dans son livre State of Denial vont en ce sens. Même Oliver Stone, pas suspect d’être pro-Bush, adopte cette version d’un Bush atterré d’apprendre, après l’invasion, qu’il n’y avait pas d’armes de destruction massives (voir les sources du film ici).

* Sortir de l’Irak. Là, c’est l’autre livre de Woodward, The War Within, qui fait la différence. Après avoir été d’une incompétence absolue (et tragique dans ses conséquences humaines) dans la gestion de la période post-invasion, les militaires américains veulent quitter l’Irak sans la stabiliser. Presque seul, Bush impose à tous « The Surge », donc une augmentation ponctuelle de troupes et une nouvelle stratégie qui permet, enfin, le retour d’une situation de paix précaire, mais réelle, pour les Irakiens.

*La crise financière. Il n’a rien fait pour l’éviter, c’est sûr. Mais sa responsabilité est totalement partagée avec l’administration démocrate de Bill Clinton. La meilleure pièce à conviction est tombée cette semaine, avec l’extraordinaire documentaire de Frontline, sur PBS: The Warning. Il démontre que les conseillers économiques de Clinton — Rubin, Greenspan, Summers — ont activement empêché la seule personne saine d’esprit sur cette question, la régulatrice Brooksely Born, de faire son travail en réglementant ce qui allait devenir les produits financiers toxiques. Bush n’a que suivi dans les traces de Clinton. (On peut voir l’émission en ligne ici.)

Cela n’exonère pas Bush devant l’histoire, mais son avocat de la défense aurait tout de même deux ou trois choses à dire.

La liste des raisons qui font que Bush était un mauvais président est longue. Même s’il avait été un bon président de droite, la liste de nos désaccords seraient nombreux. Je vais cependant emmener ici trois arguments

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À propos de Jean-François Lisée

Il avait 14 ans, dans sa ville natale de Thetford Mines, quand Jean-François Lisée est devenu membre du Parti québécois, puis qu’il est devenu – écoutez-bien – adjoint à l’attaché de presse de l’exécutif du PQ du comté de Frontenac ! Son père était entrepreneur et il possédait une voiture Buick. Le détail est important car cela lui a valu de conduire les conférenciers fédéralistes à Thetford et dans la région lors du référendum de 1980. S’il mettait la radio locale dans la voiture, ses passagers pouvaient entendre la mère de Jean-François faire des publicités pour « les femmes de Thetford Mines pour le Oui » ! Il y avait une bonne ambiance dans la famille. Thetford mines est aussi un haut lieu du syndicalisme et, à cause de l’amiante, des luttes pour la santé des travailleurs. Ce que Jean-François a pu constater lorsque, un été, sa tâche était de balayer de la poussière d’amiante dans l’usine. La passion de Jean-François pour l’indépendance du Québec et pour la justice sociale ont pris racine là, dans son adolescence thetfordoise. Elle s’est déployée ensuite dans son travail de journalisme, puis de conseiller de Jacques Parizeau et de Lucien Bouchard, de ministre de la métropole et dans ses écrits pour une gauche efficace et contre une droite qu’il veut mettre KO. Élu député de Rosemont en 2012, il s'est battu pour les dossiers de l’Est de Montréal en transport, en santé, en habitation. Dans son rôle de critique de l’opposition, il a donné une voix aux Québécois les plus vulnérables, aux handicapés, aux itinérants, il a défendu les fugueuses, les familles d’accueil, tout le réseau communautaire. Il fut chef du Parti Québécois de l'automne 2016 à l'automne 2018. Il est à nouveau citoyen engagé, favorable à l'indépendance, à l'écologie, au français, à l'égalité des chances et à la bonne humeur !