Obama, l’an 1: ce qui A marché

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« Voilà pourquoi les ignorants et les incapables et les gens négatifs et la droite gagnent toujours » rageait un président démocrate, Bill Clinton, au micro d’un journaliste progressiste qui lui reprochait son inaction, un an après son élection. « Ils jouent sur le cynisme des médias. Et ils vont continuer de gagner jusqu’à ce que quelqu’un dise la vérité. Que nous nous tuons à la tâche chaque jour pour aider les gens et progresser. Mais vous nous mesurez à un idéal impossible, et vous ne nous donnez jamais de crédit pour nos actions. » La tirade, qu’on peut lire — et entendre — ici, me revient en tête au moment de tracer le bilan, globalement positif, de seulement 9 mois de pouvoir de Barack Obama. Voici ce pour quoi il faut l’applaudir :

1) Il a changé la réputation des États-Unis dans le monde, dénonçant l’utilisation de la torture, promettant de fermer Guantanamo (ce qui est difficile à faire), reprenant le dialogue multilatéral, parlant avec respect au monde musulman. Il a changé la tonalité du débat.

2) Il a fait faire à son pays un virage écologique majeur. Il participe activement aux discussions sur le changement climatique, il a redonné des dents à l’Environment Policy Agency, il a investi massivement dans le transport public, la rénovation énergétique, les trains rapides. Il a relevé les normes d’efficacité énergétique des voitures et a couvert les SUV. Son projet de loi pour l’établissement d’un marché du carbone progresse, même s’il n’est pas parfait.

3) Il a protégé les consommateurs contre les banques en réprimant les abus dans la gestion des cartes de crédit, il a prolongé la couverture d’assurance des chômeurs de longue durée, il a protégé les petits propriétaires contre la perte de leur résidence, il a sauvé (à grand prix) des dizaines de milliers d’emplois dans l’industrie de l’automobile.

4) Il a utilisé son pouvoir exécutif pour permettre la recherche sur les cellules souche et permettre les subventions à des cliniques de contrôle des naissances qui parlent d’avortement. Il a augmenté le budget culturel du National Endowment for the Arts.

5) Il a, même selon son principal critique de gauche, l’économiste/Nobel Paul Krugman du NYTimes, réussi à empêcher l’économie américaine de tomber dans l’abîme qui la menaçait en début d’année. Ce qui n’est pas peu dire.

Ce serait déjà considérable pour quelques mois de travail. (Pour les pointilleux, le site Politifact.com calcule 49 promesses remplies, 129 en cours de réalisation, 7 promesses brisées.) Mais il est en train de réussir là où aucun président n’a réussi avant lui: faire entrer les États-Unis dans le XXè siècle (pas le XXIe, le XXe) en donnant au pays une couverture médicale décente. Aussi dans les tuyaux: une réforme du code du travail qui permettrait d’effacer 30 ans de pratique patronale outrageusement anti-syndicale, avec la complicité active de l’État.

Je donne à Obama un B. Ce qui est une très bonne note: 80%.  On aimerait qu’il soit encore meilleur, c’est sûr. Mais Clinton avait raison. Il faut reconnaître l’action concrète et applaudir lorsque cela est justifié. Avec Obama, ce l’est assurément.

(Photo: CreativeCommons)

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À propos de Jean-François Lisée

Il avait 14 ans, dans sa ville natale de Thetford Mines, quand Jean-François Lisée est devenu membre du Parti québécois, puis qu’il est devenu – écoutez-bien – adjoint à l’attaché de presse de l’exécutif du PQ du comté de Frontenac ! Son père était entrepreneur et il possédait une voiture Buick. Le détail est important car cela lui a valu de conduire les conférenciers fédéralistes à Thetford et dans la région lors du référendum de 1980. S’il mettait la radio locale dans la voiture, ses passagers pouvaient entendre la mère de Jean-François faire des publicités pour « les femmes de Thetford Mines pour le Oui » ! Il y avait une bonne ambiance dans la famille. Thetford mines est aussi un haut lieu du syndicalisme et, à cause de l’amiante, des luttes pour la santé des travailleurs. Ce que Jean-François a pu constater lorsque, un été, sa tâche était de balayer de la poussière d’amiante dans l’usine. La passion de Jean-François pour l’indépendance du Québec et pour la justice sociale ont pris racine là, dans son adolescence thetfordoise. Elle s’est déployée ensuite dans son travail de journalisme, puis de conseiller de Jacques Parizeau et de Lucien Bouchard, de ministre de la métropole et dans ses écrits pour une gauche efficace et contre une droite qu’il veut mettre KO. Élu député de Rosemont en 2012, il s'est battu pour les dossiers de l’Est de Montréal en transport, en santé, en habitation. Dans son rôle de critique de l’opposition, il a donné une voix aux Québécois les plus vulnérables, aux handicapés, aux itinérants, il a défendu les fugueuses, les familles d’accueil, tout le réseau communautaire. Il fut chef du Parti Québécois de l'automne 2016 à l'automne 2018. Il est à nouveau citoyen engagé, favorable à l'indépendance, à l'écologie, au français, à l'égalité des chances et à la bonne humeur !