Pendant ce temps, en Chine, les droits reculent

liuCeux qui avaient cru les Chinois qui affirmaient que la tenue des Jeux Olympiques à Pékin ouvrirait une nouvelle ère de modernité et de tolérance, doivent déchanter.

Il y eu deux attentats le 25 décembre dernier. Le premier, raté, par un opérateur d’Al Qaida voulant terroriser l’Amérique. Un autre, malheureusement réussi, par l’État chinois contre la liberté d’expression. Liu Xiaobo, qu’on appelle le Vaclav Havel chinois, a été condamné à 11 ans de prison pour délit d’opinion. Xiaobo est le principal animateur du combat pour la libéralisation du système politique chinois. Non violent, mesuré dans ses paroles et dans ses actes. Son emprisonnement (pour la seconde fois) nous livre deux indications:

1. Le pouvoir chinois a toujours aussi peur de la liberté d’expression politique et réprime toute action, même modérée, visant à susciter un débat sur la libéralisation politique du régime;

2. Comme l’indique le sinologue Jean-Philippe Béjà dans un récent texte, l’arrestation signale aussi que la force grandissante de la Chine dans le monde la rend non seulement encore plus imperméable aux pressions internationales, mais en fait la chef de file d’un mouvement mondial qui affaiblit le combat pour les droits de la personne:

En infligeant une condamnation si sévère pour un délit d’opinion, les dirigeants chinois annoncent au monde que les temps ont changé. A la différence de l’époque de Jiang Zemin, la Chine n’a plus besoin d’accorder aux Occidentaux des faveurs pour obtenir la clause de la nation la plus favorisée, ou pour entrer à l’OMC.

Aujourd’hui, ce sont les puissances occidentales qui ont besoin d’elle, pour relancer l’économie à la suite de la crise, pour obtenir des parts du mirobolant marché chinois, pour faire pression sur l’Iran et la Corée du Nord, ou pour aboutir à un accord sur le réchauffement de la planète. Lors de sa première visite en Chine en novembre dernier, Barack Obama n’a pas soulevé publiquement le cas du plus fameux dissident du pays, ce qui a sans aucun doute été interprété comme une permission de condamner. François Fillon, en visite à Pékin à la veille du procès, a bien entendu gardé le silence. Les dirigeants du parti communiste chinois sont bien conscients de cette nouvelle situation et en profitent pour imposer de nouvelles normes dans les relations internationales. Ainsi, ils exercent des pressions sur les gouvernements qui reçoivent le Dalai Lama ou [la militante Oïgour]Rebyia Kadeer, et les menacent d’interdire le marché chinois à leurs entreprises.

Ces menaces sont efficaces et depuis quelques années, on assiste à un retour en force du réalisme dans les relations entre états tandis que la question des droits de l’homme est de plus en plus ignorée. Soutenue par de nombreux pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine, sans compter la Russie, la Chine parvient de plus en plus à imposer de nouvelles normes qui font la part belle à la souveraineté nationale et relèguent à l’arrière plan les progrès qui avaient été faits depuis la fin de la guerre froide.

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À propos de Jean-François Lisée

Il avait 14 ans, dans sa ville natale de Thetford Mines, quand Jean-François Lisée est devenu membre du Parti québécois, puis qu’il est devenu – écoutez-bien – adjoint à l’attaché de presse de l’exécutif du PQ du comté de Frontenac ! Son père était entrepreneur et il possédait une voiture Buick. Le détail est important car cela lui a valu de conduire les conférenciers fédéralistes à Thetford et dans la région lors du référendum de 1980. S’il mettait la radio locale dans la voiture, ses passagers pouvaient entendre la mère de Jean-François faire des publicités pour « les femmes de Thetford Mines pour le Oui » ! Il y avait une bonne ambiance dans la famille. Thetford mines est aussi un haut lieu du syndicalisme et, à cause de l’amiante, des luttes pour la santé des travailleurs. Ce que Jean-François a pu constater lorsque, un été, sa tâche était de balayer de la poussière d’amiante dans l’usine. La passion de Jean-François pour l’indépendance du Québec et pour la justice sociale ont pris racine là, dans son adolescence thetfordoise. Elle s’est déployée ensuite dans son travail de journalisme, puis de conseiller de Jacques Parizeau et de Lucien Bouchard, de ministre de la métropole et dans ses écrits pour une gauche efficace et contre une droite qu’il veut mettre KO. Élu député de Rosemont en 2012, il s'est battu pour les dossiers de l’Est de Montréal en transport, en santé, en habitation. Dans son rôle de critique de l’opposition, il a donné une voix aux Québécois les plus vulnérables, aux handicapés, aux itinérants, il a défendu les fugueuses, les familles d’accueil, tout le réseau communautaire. Il fut chef du Parti Québécois de l'automne 2016 à l'automne 2018. Il est à nouveau citoyen engagé, favorable à l'indépendance, à l'écologie, au français, à l'égalité des chances et à la bonne humeur !