Pour une politique agricole qui favorise la stabilité, la relève et la souveraineté alimentaire

Proposition #18 du candidat Jean-François Lisée

Le point de départ de ma réflexion en matière d’agriculture, et plus largement d’alimentation, est qu’il ne s’agit pas d’un simple marché. Ces secteurs développent des produits essentiels – tout comme l’eau ou l’électricité – et ont un impact majeur sur l’aménagement du territoire, le mode de vie et le bien-être. Pour cette raison, un discours simpliste souhaitant imposer sans plus réfléchir le libre marché dans le secteur de l’agriculture et l’agroalimentaire néglige son caractère stratégique pour le Québec. Le deuxième principe qui guide de ma réflexion est la nécessité pour les agriculteurs de pouvoir compter sur un environnement stable, durable et prévisible, où l’État intervient pour garantir un système solide de partage des risques.

Je souhaite ainsi m’inscrire dans la continuité de l’action des gouvernements du Parti Québécois. D’abord, il y a eu les grandes avancées de René Lévesque et de Jean Garon qui, avec le zonage agricole, ont créé un garde-fou sur la spéculation des terres. Puis, avec Lucien Bouchard, nous avons créé la Financière agricole qui a été un progrès considérable. Finalement, François Gendron avec la politique de souveraineté alimentaire fixait des orientations pertinentes et largement acceptées, mais le gouvernement libéral a malheureusement mis cette politique de côté, sans la remplacer par d’autres orientations. Il faut dire que l’absence d’orientation est la marque de commerce du Parti libéral dans le domaine agroalimentaire, comme dans tant d’autres dossiers. Tous les pays dans le monde soutiennent leur agriculture et le Québec ne doit pas faire exception à cette règle.

1.Rétablir une prévisibilité financière pluriannuelle pour les agriculteurs

Le premier engagement de gouvernement que je dirigerais serait de rétablir une certaine prévisibilité financière pour les agriculteurs. Depuis son retour au pouvoir, le Parti libéral a non seulement coupé dans la Financière agricole du Québec, mais a transformé une enveloppe qui était négociée sur cinq ans à une enveloppe qui doit être renouvelé chaque année. C’est l’exemple parfait de ce qu’il ne faut pas faire et je m’engage à rétablir une prévisibilité pluriannuelle du financement de la Financière agricole. Cela est d’autant plus important compte tenu des impacts des changements climatiques et de la multiplication des épisodes de climat extrême qu’il provoque.

Par ailleurs, je crois qu’il faut penser au-delà de cet enjeu et ouvrir une discussion sur le partage du risque associé au taux de change, auquel toutes les entreprises exportatrices sont exposées. En tant qu’ancien ministre du Commerce international, j’ai été sensibilisé à cet enjeu qui concerne de nombreuses entreprises autant dans la production et la transformation. Au Québec, si on a perdu nos abattoirs dans l’industrie bovine, c’est parce que le dollar canadien – gonflé artificiellement par le pétrole – nous a rendu moins compétitif. Je veux réfléchir à la façon dont le gouvernement québécois peut aider. Évidemment, il ne s’agit pas pour l’État de prendre la totalité du risque, mais bien de trouver des façons d’atténuer les chocs découlant des montagnes russes du dollar canadien.

  1. Mettre en place un FIRA+

Un deuxième enjeu qui me préoccupe est l’accaparement des terres agricoles. Le Québec se trouve en ce moment dans un processus rapide des transferts de propriétés et il faut éviter que la spéculation vienne soustraire aux jeunes la possibilité d’établir de nouvelles entreprises agricoles. Le Fonds d’investissement pour la relève agricole (FIRA) a été créé précisément pour favoriser l’accès à la terre chez les jeunes agriculteurs, notamment à travers son programme de location-achat. Doté initialement de 75 millions de dollars, le programme ne répond cependant pas à la demande actuelle. Je crois qu’il faut réfléchir à un FIRA+ qui permettrait de financer tous les bons dossiers. Il faut aussi établir une transparence dans les transactions afin de voir dans quelle mesure la valeur des terres est affectée par la spéculation et qui sont les acheteurs.

Quelque 900 jeunes par an sortent de formation collégiale et universitaire liées à l’agriculture. Il faut donner des outils à cette formidable relève.

  1. Une réglementation allégée pour les petits producteurs et les producteurs artisanaux

J’ai déjà eu l’occasion de dire pendant la campagne que je souhaitais être le premier ministre des petites entreprises. Bien sûr, il faut une réglementation solide pour protéger la qualité des aliments et les droits des travailleurs, mais il faut aussi tenir compte de la réalité des petites entreprises. Je propose que l’encadrement réglementaire tienne compte des différences entre les petites et les grandes entreprises, que ce soit dans la production ou la transformation alimentaire. Les petits producteurs et les producteurs artisanaux devraient avoir accès à une réglementation allégée. Je suis conscient que cet enjeu est délicat, mais il en va de la rentabilité de beaucoup de nos petits producteurs et de leur capacité à se concentrer sur l’essentiel, c’est-à-dire de leur capacité à développer de nouveaux produits innovateurs.

  1. Renforcer le développement de « circuits courts » en alimentation    

Un autre engagement que je souhaite prendre est de renforcer le développement de « circuits courts » en alimentation en s’appuyant sur le secteur public : hôpitaux, CHSLD, CPE, écoles ou établissements d’enseignement supérieur. Les distributeurs agroalimentaires québécois sont présentement en train de perdre des parts de marché au profit de distributeurs américains qui importent du contenu non québécois. Les avantages du Québec sont pourtant considérables, avec une production riche et diversifiée, et il existe des raisons écologiques et économiques fortes de favoriser les produits locaux. Québec doit respecter les accords internationaux, mais il doit aussi tenir compte du fait que les entreprises québécoises ont parfois à respecter une réglementation environnementale plus strictes que leurs consoeurs américaines.

Ne serait-il pas possible, par exemple, d’obliger les distributeurs à inclure un important pourcentage de contenu québécois, comme on le fait dans d’autres domaines ? Il faut conserver une saine concurrence entre les producteurs et les distributeurs, bien sûr, mais je souhaite qu’on se mette au travail pour déterminer un cadre équitable où les produits québécois vont être privilégiés.

Je veux aussi soutenir l’agriculture urbaine qui se multiplie dans chacune de nos villes, faire en sorte que les cuisines institutionnelles qui sont souvent abandonnées le soir dans nos écoles puissent être utilisées par les initiatives de cuisines collectives pour inciter à de meilleures habitudes de vie avec des produits d’ici. Il y a tant à faire !

Je reprendrai notre politique de Souveraineté alimentaire.

  1. Accroître la production des serres québécoises

Avec François Gendron, le Parti Québécois avait annoncé une entente avec Hydro-Québec afin de mieux soutenir l’agriculture en serre. Il suffisait de la mettre en œuvre. Avec les importants surplus d’Hydro-Québec, je crois qu’il est important de la relancer. Depuis plusieurs années, les producteurs de serre demandent qu’on leur accorde un tarif préférentiel afin de réduire leur coût d’exploitation. Le Québec souffre d’un retard important face à l’Ontario, où les producteurs en serre ont accès à du gaz naturel à très bon prix. Comme nous le faisons avec les alumineries, je propose d’accroître substantiellement la production des serres québécoises et la disponibilité des légumes québécois à l’année en facilitant l’accès des producteurs à un tarif biénergie très compétitif.

  1. Forêt : vivement l’indépendance

Sur le bois d’œuvre, la politique américaine en est une d’intimidateurs. À chaque cycle, ils utilisent leur pouvoir afin d’extraire des concessions supplémentaires aux producteurs canadiens. Notre difficulté est que notre position est très différente, et à certains égards, contradictoire, de celle des producteurs de Colombie-Britannique. Et nous avons un gouvernement canadien pour qui ce n’est pas une priorité. Si le gouvernement canadien avait mis sur le dossier du bois d’œuvre un pour cent de l’énergie qu’il a mis à essayer de vendre le pétrole bitumineux dans le projet McKenzie, cela serait probablement réglé depuis longtemps.

Ce dossier est en soi un des meilleurs arguments pour l’indépendance. Il serait plus efficace d’être face à face avec les américains et de négocier nous-mêmes nos ententes. Évidemment, la seule stratégie qui fonctionne avec les américains, c’est d’avoir des alliés sur le marché américain qui veulent avoir accès à notre bois d’œuvre contrairement aux producteurs.

Les transformateurs et les consommateurs américains doivent être avec nous pour faire leurs pressions sur leur gouvernement. Et pour cela, il nous faut une diplomatie active. En ce moment, on ne le joue pas du tout. Le gouvernement Couillard depuis 2 ans démantèle la présence québécoise à l’étranger et aux États-Unis, réduit les budgets, réduit le nombre de gens qui défendent nos intérêts. Alors, ensuite il ne faut pas se surprendre que notre voix ne soit pas entendue et que notre réseau d’alliés ne soit pas constitué. Mon expérience à titre d’ancien correspondant à l’étranger et ancien ministre du commerce extérieur m’indique que nous ne sommes pas là. Les intérêts du Québec aux États-Unis ne sont pas correctement défendus. Je ne les vois pas exiger du gouvernement fédéral de mettre la diplomatie canadienne à notre service. Chaque diplomate est payé, 1/5 de sa journée, c’est nous qui le payons. Est-ce qu’on pourrait avoir juste 1/5 du service?

  1.  La promesse de la biomasse

On a lancé en 2013 un programme de 35 millions de dollars. Il a été épuisé en une année pour une centaine de projets et il n’a pas été renouvelé. C’est pourtant complètement structurant, c’est bon pour la forêt, bon pour le travail, pour l’environnement Les projets existent, et cela remplace le mazout dans les industries. Un gouvernement qui se vante de faire du transfert technologique, du transfert écologique et qui ne remet pas ce programme-là en ligne, cela n’a pas de sens. Ce serait une priorité à le remettre et à l’étendre. Tant qu’il y a de la demande, il faut y répondre. C’est notre transition écologique. Au lieu de prendre du pétrole ou du mazout étranger, on utilise notre biomasse forestière résiduelle.

  1. La charte du bois

Une des belles choses que j’ai vues quand j’étais ministre du commerce extérieur, c’est la qualité de notre bois, son caractère écologique. Le bois québécois est considéré comme plus résistant aux intempéries.

Le Québec doit être une vitrine pour cela. Le gouvernement québécois doit faire en sorte que ses nouvelles constructions mettent le bois en évidence lorsqu’il construit lui-même ses édifices, ses écoles. Le bois, c’est beau, chaleureux, écologique et c’est bon pour notre économie. C’est la voie à suivre.

Ces propositions constituent la première d’une série d’engagements forts pour relancer l’économie québécoise. Au cours de la campagne, j’aurai l’occasion de dévoiler d’autres volets de mon projet, notamment pour les PME, les régions, l’innovation et l’exportation.

Vous êtes plutôt d’accord ?
Joignez-vous à ma campagne

Voici les propositions que j’ai mise de l’avant
depuis mon entrée dans la campagne, le 16 mai dernier.

Proposition #1: Chasser les libéraux. Réussir l’indépendance. Dans cet ordre.

Proposition #2: Immigration : Le chemin du succès

Proposition #3: Santé : Gel de l’enveloppe de rémunération des médecins

Proposition #4: Inégalités sociales : Un Québec riche de son équité

Proposition #5: Sièges sociaux : Miser sur la Caisse de dépôt et le développement régional

Proposition #6: Identité : La concordance culturelle

Proposition #7: Priorité PME : Moins de paperasse, plus d’entrepreneuriat

Proposition #8: Laïcité – une approche résolue et responsable

Proposition #9: Compte à rebours 2022 !

Proposition #10: Anticosti – Enfin sortir des faux-fuyants !

Proposition #11: Incarner la laïcité et l’ouverture

Proposition #12: Le pipeline Énergie Est: Pourquoi il faut dire Non et Non !

Proposition #13 : Pour un processus d’évaluation et de consultation « digne du 21e siècle »

Proposition #14 : Développement régional : rétablir les budgets et reconstruire les outils de développement dans le respect des régions

3 avis sur « Pour une politique agricole qui favorise la stabilité, la relève et la souveraineté alimentaire »

  1. Je suis à lire Penser l’État de Philippe Braud, 1997 et 2004, Éditions du Seuil. J’avais acheté après avoir lu L’État contre les jeunes : comment les baby-boomers ont détourné le système d’Éric Duhaime, 2011; Pour en finir avec le Gouvernemaman : La suite de L’Illusion tranquille… le film, 2011; puis L’avenir du Québec, ce n’est pas moins d’État, mais mieux d’État de Martine Ouellet, 2015. Il s’y écrit professionnellement, académiquement, de Souveraineté; entre autres. Étant donné le sujet, je dirais que c’est à date, pointu et pertinent.

    J’ai écrit souveraineté à droite en haut ici, sous La boite à Lisée, où il y a une loupe et écrit Recherche. Faites pour voir le résultat.

    Qui pour Président du Québec dans disons dix ans ? #FrançoisLegault #FrançoiseDavid #Jean-FrançoisLisée #PhilippeCouillard #GabrielNadeau-Dubois #AmirKhadir ?

  2. Bien intéressant et complexe la question de l’agriculture et la souveraineté alimentaire, et la question du bois d’oeuvre.

    Mais ne faudrait-il pas définir clairement ce que signifie la souveraineté alimentaire ?

    En ce moment, les fermes disparaissent et les super fermes prennent de l’expansion, ce qui favorise les OGM, il y a des articles qui en ont parlé, plusieurs « fermiers » y ont adhéré. Pourrait-on avoir la vérité là-dessus ?

    Un autre phénomène. Quand je vais chez IGA, qu’est-ce qu’on voit de plus en plus sur les étagères, le PRÉSIDENT, un distributeur dont l’objectif est la monopolisation de la distribution, donc, qui décidera de ce que nous mangerons et de la qualité des aliments. Cherchez une autre marque d’asperge……..
    Bien sûr, il y a deux ou trois grands distributeurs……..

    L’AECG s’en vient, le PQ et vous-mêmes défendez la clientèle des hommes d’affaires, pas par naïveté, mais pour les avoir sur votre côté, compétition avec le PLQ et la CAQ oblige. Autrement dit vous êtes un parti du centre droit occupé par la finance et les multinationales au centre de cette entente.
    L’association porcine du Québec salive à l’idée de passer de 4000 tonnes de viandes à 80000 tonnes dans quelques années, les profits faramineux pour eux, et tant pis pour l’écologie et l’augmentation des super navires qui découleront de ce libre marché totalement ABERRANT.
    Le pouvoir appelle le profit, et avec le laxisme éthique derrière les cris de vierges effarouchés, de plus en plus de politiciens « affairistes » entrent dans le CLUB.

    Malgré vos discours, je ne vois aucune volonté de changement. Vous suivez le courant du néo-libéralisme sans plus. Ha oui, les politiques économiques d’ajustement…….
    Avec la signature de l’EACG, un avertissement qui ne date pas d’hier. Mais où sont les politiciens élu par le peuple, mais dont la culture clientéliste est devenu la principale stratégie: divisé sans que ça paraisse.
    Pauvre peuple québécois. Pauvre d’esprit critique, riche de la pensée unique.

    Comment l’AECG Canada-Union Européenne va miner la démocratie
    par Ellen Gould October 14, 2016

    ( Ellen Gould est chercheure spécialisée en commerce international, et une associée de recherche avec CCPA-BC. »
    «« Ce que les Canadiens et les Européens doivent plutôt noter dans l’AECG ce sont les nombreuses façons dont l’accord limite les pouvoirs des gouvernements démocratiquement élus et les obligent à accorder un traitement spécial aux entreprises étrangères.
    Un simple exemple illustre comment avec l’AECG la façon dont nous sommes gouvernés va changer fondamentalement. Il s’agit de la clause qui garantit aux entreprises étrangères un statut égal ou supérieur à celui des citoyennes et citoyens d’un pays dans les audiences publiques portant sur un projet de règlementation. À la lecture de cette étonnante disposition, vous n’en croirez pas vos yeux. Pourtant, le texte est on ne peut plus clair : dans les consultations publiques sur un projet de réglementation, l’AECG exige que «chaque Partie permette aux personnes [un terme qui inclut les entreprises] de l’autre Partie de participer à des conditions non moins favorables que celles accordées à ses propres personnes.» [i]
    http://behindthenumbers.ca/2016/10/14/comment-laecg-canada-union-europeenne-va-miner-la-democratie/?utm_source=emailcampaign141&utm_medium=phpList&utm_content=HTMLemail&utm_campaign=Infolettre%3A+AG+le+5+novembre%2C+communiqu%C3%A9+d%27%C3%89chec+aux+paradis+fiscaux%2C+lutte+contre+l%27A%C3%89CG%2C+etc.

    Décidément, toujours pas de vision d’ensemble. Pas de projet approuvé par le Peuple: le projet de société pour l’indépendance:

    LE CLIETÉLISME
    Les travailleurs à valeur ajoutée: l’individu entrepreneur si cher au néo-libéralisme.

  3. Bonjour de Québec. Je ne m’y connais pas du tout en agriculture mais j’en apprends dans votre proposition numéro 18. J’ai cependant vu à la télé des gens qui désirent que leurs enfants continuent leur travail sur leur ferme quelle qu’elle soit et il semble que ce soit de plus en plus difficile ! Les enfants veulent continuer le patrimoine, parfois de plusieurs générations, mais ils ne reçoivent pas l’aide dont ils auraient besoin. C’est navrant de voir ça ! J’espère que vous pourrez remédier à ce problème et à tous les autres. Pour le reste je vous fais confiance si le parti québécois reprend le pouvoir majoritairement en 2018. Mais le temps passe et deux ans ou trois à attendre des changements en agroalimentaire c’est assez long merci !

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