Réplique amicale de JF Lisée à Pierre Dubuc

, me dit un ami hier, Dubuc te critique ce matin !

Je réponds : Encore ! Bizarre, pourtant j’ai lu La Presse et je n’ai rien vu.
Non, précise-t-il, pas Alain, Pierre.

Ma curiosité est piquée. Pierre Dubuc contribue de manière constante et constructive depuis plusieurs années aux débats du mouvement souverainiste et social-démocrate. De plus, il a récemment noté que lui et moi étions d’accord sur la faute politique que constituaient les fusions municipales à Montréal. Je suis donc intéressé par son propos. Et doublement peiné de trouver ce que j’y trouve. Mais d’abord, un détour.

Une de mes premiers billets sur mon blogue de L’actualité portait sur la polémique entre Denise Bombardier et Pierre Floglia. Extrait : Je suis cependant déçu, dans sa chronique fort bien écrite, d’avoir lu ceci au sujet des témoignages de lecteurs cités par Foglia. Mme B :

Ce sont « des voix qui dérangent parce qu’elles disent tout haut des vérités qu’on n’entend jamais », écrit le chroniqueur.

Or, voici ce que Foglia avait écrit :

Des voix qui dérangent parce qu’elles disent tout bas des vérités qu’on n’entend jamais ? Que ce soit bien clair : pas une foutue seconde.

J’ai donc un fort sentiment de Déjà Vu, à la lecture du billet, très moyennement argumenté, de Pierre d’hier. Il utilise la même technique que Mme B. Jugez-en. Il résume ainsi ma pensée :

Pour nous montrer qu’il est prêt à la bagarre sur cette question, il écarte d’un geste impérial la réaction prévisible de la communauté anglophone dont il nous dit qu’elle sera « en furie ».

Or voici ce que j’ai écrit :

La communauté anglophone ne serait-elle pas en furie ? The Gazette et Alliance Québec, oui, c’est dans leur code génétique. Mais 61% des non-francophones y sont favorables, selon Léger Marketing, ce qui est considérable. Les parents anglophones sont aussi intéressés que leurs voisins francophones à voir leurs enfants bien maîtriser leur langue seconde.

Bref, le contraire. Dubuc fait du Bombardier. Je me serais attendu à davantage d’honnêteté intellectuelle de la part de ce Dubuc-là.

Pierre ne conteste pas que l’immense majorité des francophones, 76%, sont d’accord avec ma proposition. Mais il adopte la posture de l’avant-garde nationaliste, affirmant, et je cite, qu’il faut en matière linguistique « protéger contre eux-mêmes » nos pauvres concitoyens qui ne savent pas ce qui est bon pour eux.

Il veut s’appuyer ensuite sur l’exemple de la loi 101. Il écrit : « Il fallait du courage au Dr Laurin et au Parti Québécois pour faire adopter cette loi dont ils savaient qu’elle serait impopulaire auprès d’une frange importante de l’électorat francophone. » En effet, il fallait du courage pour introduire un changement majeur, structurel, qui allait faire entrer dans les écoles primaires et secondaires francophones un grand nombre d’allophones et plusieurs anglophones – ceux arrivés après 1977 – avec les résultats positifs que l’on applaudit tous aujourd’hui. Laurin a mis un terme à la culture du repli et du refus d’accueillir l’autre dans nos institutions qui prévalait depuis des générations. Pierre applaudit, là, ce qui le traumatise dans ma proposition sur les Cégeps. C’est son opinion, respectable.

Cependant il fait une erreur de fait que je lui souligne amicalement. Loin de « protéger contre eux-mêmes » les francophones, le Dr Laurin avait fait réaliser et publier des sondages qui montraient que plus des deux tiers des francophones étaient favorables au projet de loi 101, et cet appui ne s’est jamais démenti. Il n’était pas électoraliste pour autant. Mais en phase avec l’opinion. A méditer.

Ce contenu a été publié dans Anglo-Québécois par Jean-François Lisée, et étiqueté avec . Mettez-le en favori avec son permalien.

À propos de Jean-François Lisée

Il avait 14 ans, dans sa ville natale de Thetford Mines, quand Jean-François Lisée est devenu membre du Parti québécois, puis qu’il est devenu – écoutez-bien – adjoint à l’attaché de presse de l’exécutif du PQ du comté de Frontenac ! Son père était entrepreneur et il possédait une voiture Buick. Le détail est important car cela lui a valu de conduire les conférenciers fédéralistes à Thetford et dans la région lors du référendum de 1980. S’il mettait la radio locale dans la voiture, ses passagers pouvaient entendre la mère de Jean-François faire des publicités pour « les femmes de Thetford Mines pour le Oui » ! Il y avait une bonne ambiance dans la famille. Thetford mines est aussi un haut lieu du syndicalisme et, à cause de l’amiante, des luttes pour la santé des travailleurs. Ce que Jean-François a pu constater lorsque, un été, sa tâche était de balayer de la poussière d’amiante dans l’usine. La passion de Jean-François pour l’indépendance du Québec et pour la justice sociale ont pris racine là, dans son adolescence thetfordoise. Elle s’est déployée ensuite dans son travail de journalisme, puis de conseiller de Jacques Parizeau et de Lucien Bouchard, de ministre de la métropole et dans ses écrits pour une gauche efficace et contre une droite qu’il veut mettre KO. Élu député de Rosemont en 2012, il s'est battu pour les dossiers de l’Est de Montréal en transport, en santé, en habitation. Dans son rôle de critique de l’opposition, il a donné une voix aux Québécois les plus vulnérables, aux handicapés, aux itinérants, il a défendu les fugueuses, les familles d’accueil, tout le réseau communautaire. Il fut chef du Parti Québécois de l'automne 2016 à l'automne 2018. Il est à nouveau citoyen engagé, favorable à l'indépendance, à l'écologie, au français, à l'égalité des chances et à la bonne humeur !