L’homme politique québécois le plus populaire, Amir Khadir, a une consigne à donner aux électeurs québécois qui sont, comme lui, progressistes et indépendantistes. Le 2 mai, Bloc ou NPD ? Il répond, en un mot: choisissez !
Sa consigne de vote ne fait toutefois pas l’unanimité au sein des troupes de Québec solidaire dont deux importantes signatures affirment que :
Une défaite importante pour le Bloc serait une victoire non seulement pour Harper mais pour l’ensemble des dominants au Canada.
J’y reviens un peu plus bas. Mais en entrevue ce jeudi avec votre blogueur favori, Amir Khadir précise sa pensée:
* Si vous avez un député libéral ou conservateur: votez pour le candidat bloquiste ou NPD le mieux placé pour le battre. Et allez ici pour savoir de qui il s’agit. Il appelle en particulier à voter pour les bloquistes Viviane Barbot dans Papineau pour battre Justin Trudeau et Michel Létourneau dans Limoilou pour battre la conservatrice Sylvie Boucher.
* Si vous avez un député bloquiste: votez pour lui ou pour le candidat NPD, selon votre choix. Par exemple, Khadir souhaite la réélection de Maria Mourani dans Ahuntsic, mais voterait pour le NPD Alexandre Boulerice « souverainiste et progressiste », note-t-il, dans Rosemont-La-Petite-Patrie, même s’il « adore » le bloquiste Bernard Bigras.
Même s’il sait que les députés NPD ont voté, à Ottawa, pour la Constitution de 1982, se sont prononcés, en 1989, contre l’accord du lac Meech et ont voté, en 2000, pour la loi sur la Clarté de Stéphane Dion, Amir Khadir prête foi aux déclarations de Layton selon lesquelles il respecterait un choix référendaire du Québec. (Même si Layton a laissé son chef de campagne du NPD, Brad Lavigne, affirmer cette semaine que le parti appliquerait la loi Dion sur la clarté).
Il appelle donc les progressistes et indépendantistes à passer de la stratégie bloquiste (« c’était le bon choix », dit-il) à une stratégie de la « diversification ».
Dans un courriel envoyé après l’entrevue, il précise:
C’est pas à Layton de faire l’indépendance du Québec. C’est à nous! Et une fois que notre peuple en aura décidé, nous avons intérêt à ce que le Canada avec lequel nous devrons négocier les termes de cette nouvelle réalité, qui ne va pas sans de nouvelles collaborations et ententes, soit sous le leadership de gens comme Jack Layton: un homme de principe, généreux et ouvert – qui de surcroit s’est engagé à respecter notre droit à l’autodetermination. Il est temps de créer au Québec les conditions gagnantes pour le NPD au Canada. C’est le meilleur service qu’on peut rendre aux aspirations du peuple Québécois, y compris son indépendance.
C’est, à mon avis, investir beaucoup d’espoir en un seul homme en oblitérant le poids des forces pro-Canadiennes qui se sont exprimées dans le NPD au moment de la constitution, de Meech et de la loi sur la Clarté et s’expriment chez Layton lui-même dans son refus d’un réel asymétrisme en ce qui concerne l’application de la loi 101 pour 100 000 salariés québécois sous juridiction fédérale.
« On n’a pas besoin de 50 sièges pour avoir un Bloc fort », dit encore Amir Khadir. Une trentaine suffisent. Mais si c’était moins de 10, comme le prévoient certaines projections ? Il refuse d’y croire. Il prévoit environ 40 sièges au Bloc et un maximum de 10 au NPD. Suite lundi soir.
Des voix dissidentes à QS
À Québec Solidaire, tous ne sont pas du même avis que le porte-parole Khadir. François Cyr, l’ex-président de l’Union des forces progressistes qui s’est fondu dans QS, et Pierre Beaudet, longtemps l’animateur d’Alternatives, signent un texte en forme de mise en garde:
Au Québec dans la grande majorité des comptés, un vote pour le Bloc est cependant ce qui peut empêcher Stephen Harper de constituer un gouvernement majoritaire et de procéder à sa « révolution » de droite.
Le vote stratégique NPD peut-être indiqué dans certains cas, écrivent-ils:
Voter NPD peut s’inscrire dans une approche stratégique qui vise à affaiblir la droite et même à empêcher Harper de constituer un gouvernement majoritaire.
Il ne fait pas de doute dans nos esprits qu’il faille voter pour Thomas Mulcair dans Outremont et pour la syndicaliste Nycole Turmel dans Aylmer par exemple.
Mais Cyr et Beaudet soulèvent de sérieux doutes sur le réel caractère « de gauche » du NPD, ce qui est une chose, et indiquent de plus qu’une future fusion NPD/Parti libéral, plus probable que jamais, n’annonce rien de réjouissant pour la gauche:
Il est d’ailleurs pensable, surtout si le PLC subit une dure défaite aux élections, qu’il se produise un « rapprochement », pour ne pas dire une fusion entre un PLC affaibli et un NPD ragaillardi, autour d’un programme centriste très édulcoré, pour la défense d’un « Canada fort », hostile aux Conservateurs sur un certain nombre de fondamentaux, mais surtout incapable de représenter une réelle alternative (cela serait le « modèle » états-unien où les électeurs ont le « choix » entre l’ultra droite –les Républicains- et la droite –les Démocrates).
Ils en concluent:
Une défaite importante pour le Bloc serait une victoire non seulement pour Harper mais pour l’ensemble des dominants au Canada.