Bouquins politiques: la déquébecisation du Canada se poursuit

Vous savez que j’aime tenir la chronique, dans ces pages, de la décanadianisation du Québec et de la déquébécisation du Canada.  Des événements, petits et grands, qui montrent bien que l’indifférence grandit dans les esprits et dans les faits.

Ce jeudi, le monde des scribes politiques est en émoi car on vient d’annoncer la liste des 25 meilleurs livres politiques canadiens des derniers 25 ans. J’en ai lu plusieurs, qui sont excellents.

Cependant, aucun livre politique francophone n’est dans la liste, ce qu’a soulevé pour s’en attrister notre collègue Paul Wells dont l’un des très bons bouquins, Right Side Up: The Fall of Paul Martin and the Rise of Stephen Harper’s Conservatism, est en nomination.

J’ai eu la curiosité de regarder si des livres francophones, ou plus généralement québécois, s’étaient glissés dans la liste plus longue des 180 nominations.

Il y a, c’est un fait, quatre livres québécois francophones, dans leur version française, où on trouve votre humble serviteur:

Attendez que je me rappelle by René Lévesque
Gouverner le Québec by Robert Bourassa
Aux pays des merveilles: Essai sur les mythes politiques québécois by André Pratte
Le naufrageur: Robert Bourassa et les Québécois by Jean-François Lisée

Il y en a un certain nombre de livres dont la version anglaise figure dans la liste, même si des versions françaises existent:

Extraordinary Canadians: Wilfrid Laurier by André Pratte
Reconquering Canada: Quebec Federalists Speak Up for Change edited
by André Pratte
French Kiss: Stephen Harper’s Blind Date with Quebec
by Chantal Hébert
Memoirs: 1939-1993 by Brian Mulroney
Rogue in Power: Why Stephen Harper is Remaking Canada by Stealth by Christian Nadeau
Young Trudeau: 1919-1944: Son of Quebec, Father of Canada by Max and Monique Nemni
From Bourassa to Bourassa: Wilderness to Restoration by L.Ian MacDonald
Shake Hands with the Devil: The Failure of Humanity in Rwanda by Romeo Dallaire

Puis il y a des livres en anglais seulement (corrigez-moi si je me trompe) d’auteurs québécois:

Stephen Harper and the Future of Canada by William Johnson
The Long Road Back: The Conservative Jouney: 1993-2007
by Hugh Segal
The Right Balance: Canada’s Conservative Tradition
by Hugh Segal
Canadian Politics, 5th Edition
by James Bickerton and Alain G. Gagnon
Sacré Blues: An Unsentimental Journey Through Quebec
by Taras Grescoe
Rescuing Canada’s Right: Blueprint for a Conservative Revolution by Tasha Kheiriddin and Adam Daifallah
Globalization and the Meaning of Canadian Life by William Watson

Qu’en conclure ? 1) Qu’André Pratte est très connu, ou du moins très apprécié, au Canada-anglais; 2) Que les mémoires de Jean Chrétien ont été snobbés — ce qui est un comble!; 3) Que les organisateurs ne se sont pas forcés pour trouver les versions françaises des livres.

Mais je suis plutôt zen sur ces questions. C’est beaucoup demander aux jurys canadiens basés à Toronto de faire semblant de s’occuper du Québec, puis de le faire avec compétence. Nous sommes si loin…

Et en fait, puisqu’il s’agit de livres politiques « Canadiens » des 25 dernières années, on suppose que les choix doivent se définir en fonction d’un sujet « pancanadien ». Ce qui exclut l’essentiel des livres politiques québécois des dernières années, centrés sur le Québec. Sur le site des organisateurs, j’ai pu lire un commentaire courroucé d’un lecteur affirmant qu’aucun livre sur l’Ouest canadien n’a fait la liste.  Il y a cependant quelques livres sur la vie politique ontarienne et un livre sur les perceptions de Cuba!

Mais la liste des dix finalistes porte strictement sur une vision « pancanadienne » des choses.

Si je n’étais pas en conflit d’intérêt, je lancerais un concours des 25 meilleurs livres politiques québécois des 25 dernières années. Peut-être la FPJQ pourrait-elle s’en charger ?

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À propos de Jean-François Lisée

Il avait 14 ans, dans sa ville natale de Thetford Mines, quand Jean-François Lisée est devenu membre du Parti québécois, puis qu’il est devenu – écoutez-bien – adjoint à l’attaché de presse de l’exécutif du PQ du comté de Frontenac ! Son père était entrepreneur et il possédait une voiture Buick. Le détail est important car cela lui a valu de conduire les conférenciers fédéralistes à Thetford et dans la région lors du référendum de 1980. S’il mettait la radio locale dans la voiture, ses passagers pouvaient entendre la mère de Jean-François faire des publicités pour « les femmes de Thetford Mines pour le Oui » ! Il y avait une bonne ambiance dans la famille. Thetford mines est aussi un haut lieu du syndicalisme et, à cause de l’amiante, des luttes pour la santé des travailleurs. Ce que Jean-François a pu constater lorsque, un été, sa tâche était de balayer de la poussière d’amiante dans l’usine. La passion de Jean-François pour l’indépendance du Québec et pour la justice sociale ont pris racine là, dans son adolescence thetfordoise. Elle s’est déployée ensuite dans son travail de journalisme, puis de conseiller de Jacques Parizeau et de Lucien Bouchard, de ministre de la métropole et dans ses écrits pour une gauche efficace et contre une droite qu’il veut mettre KO. Élu député de Rosemont en 2012, il s'est battu pour les dossiers de l’Est de Montréal en transport, en santé, en habitation. Dans son rôle de critique de l’opposition, il a donné une voix aux Québécois les plus vulnérables, aux handicapés, aux itinérants, il a défendu les fugueuses, les familles d’accueil, tout le réseau communautaire. Il fut chef du Parti Québécois de l'automne 2016 à l'automne 2018. Il est à nouveau citoyen engagé, favorable à l'indépendance, à l'écologie, au français, à l'égalité des chances et à la bonne humeur !