Obama, l’an 1 : ce qui n’A PAS marché

Obama avait livré une promesse qu’il ne pouvait pas remplir — et il aurait dû le savoir : le rassemblement. Obama a bâti une organisation populaire gigantesque qu’il n’a pas utilisée — et qu’il aurait dû mettre au service du changement. Prenons-les un à un :

1) Une ère de rassemblement. Ce n’était pas qu’un slogan de fin de campagne. Dès 2004, dans le discours qui l’a révélé à la nation, il répétait comme un mantra les mots: les États-UNIS d’Amérique. Dans son excellent second livre, The Audacity of Hope, il soulignait, avec raison, le fait que les Américains et leurs élus partagent davantage d’opinions communes qu’ils n’ont de divergences. Dans tout son parcours vers la présidence, il a semblé croire et a certainement fait croire qu’avec lui, l’ère des vicieuses batailles partisanes dont l’Amérique moderne souffre — plus que beaucoup d’autres démocraties occidentales — allait cesser. C’était impossible. C’était naîf. Obama a certes tendu la main avec une constance qui force l’admiration — et il a au moins la satisfaction de voir que l’opinion reconnaît ses efforts. Mais les républicains ont développé depuis la montée du stratège Lee Atwater en 1988, sous Bush père, et son successeur Karl Rove, sous Bush fils, une culture de brutes politiques.

Et, comme ils l’ont fait avec Clinton en 1992, ils veulent affaiblir Obama en 2009. Aucun républicain ne traverse la ligne partisane pour aider Obama. Et ceux qui voudraient le faire se feraient exclure de leur parti, comme l’a compris le sénateur Arlen Specter, passant aux démocrates pour la simple raison de garder son poste. Les États-Unis d’Obama sont donc aussi désunis que ceux de Bush ou de Clinton.

2) La plus grande organisation politique de masse jamais vue. Il y a un an, au soir de la victoire électorale, l’opération Obama détenait 13 millions d’adresses courriel, des centaines de milliers de citoyens actifs, engagés, volontaires pour que le président réussisse le changement promis. La Maison-Blanche a décidé de maintenir cette organisation active. À quelle date les 13 millions ont-ils reçu un avis d’envoyer un courriel à leurs élus pour les pousser à voter pour le changement ? 11 mois plus tard, le 30 octobre 2009. Cet article du New Republic (intitulé Disorganised) révèle les problèmes organisationnels qui expliquent partiellement ce fiasco. Mais le problème est d’abord politique. Le président a choisi de jouer, seule, la carte du compromis parlementaire, des ententes avec certains lobbies, de la main tendue jusqu’au risque du ridicule. Cela a été fait sous le drapeau du pragmatisme. Mais il aurait été plus réaliste d’asseoir ce pragmatisme sur une démonstration continue de force politique, la force des réseaux laissés en jachère.

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À propos de Jean-François Lisée

Il avait 14 ans, dans sa ville natale de Thetford Mines, quand Jean-François Lisée est devenu membre du Parti québécois, puis qu’il est devenu – écoutez-bien – adjoint à l’attaché de presse de l’exécutif du PQ du comté de Frontenac ! Son père était entrepreneur et il possédait une voiture Buick. Le détail est important car cela lui a valu de conduire les conférenciers fédéralistes à Thetford et dans la région lors du référendum de 1980. S’il mettait la radio locale dans la voiture, ses passagers pouvaient entendre la mère de Jean-François faire des publicités pour « les femmes de Thetford Mines pour le Oui » ! Il y avait une bonne ambiance dans la famille. Thetford mines est aussi un haut lieu du syndicalisme et, à cause de l’amiante, des luttes pour la santé des travailleurs. Ce que Jean-François a pu constater lorsque, un été, sa tâche était de balayer de la poussière d’amiante dans l’usine. La passion de Jean-François pour l’indépendance du Québec et pour la justice sociale ont pris racine là, dans son adolescence thetfordoise. Elle s’est déployée ensuite dans son travail de journalisme, puis de conseiller de Jacques Parizeau et de Lucien Bouchard, de ministre de la métropole et dans ses écrits pour une gauche efficace et contre une droite qu’il veut mettre KO. Élu député de Rosemont en 2012, il s'est battu pour les dossiers de l’Est de Montréal en transport, en santé, en habitation. Dans son rôle de critique de l’opposition, il a donné une voix aux Québécois les plus vulnérables, aux handicapés, aux itinérants, il a défendu les fugueuses, les familles d’accueil, tout le réseau communautaire. Il fut chef du Parti Québécois de l'automne 2016 à l'automne 2018. Il est à nouveau citoyen engagé, favorable à l'indépendance, à l'écologie, au français, à l'égalité des chances et à la bonne humeur !